CARACTERISATION DES MICROORGANISMES PATHOGENES ISOLES DES ALIMENTS D’ORIGINE ANIMALE CONSOMMES EN MILIEU SCOLAIRE ET DES ECOUVILLONS DES MAINS DES OPERATRICES DANS LE DEPARTEMENT DU MONO (BENIN) ET MESURES DE MAITRISE

Les aliments d'origine animale sont une source importante de protéines dans l’alimentation humaine. Cependant, ils sont sujets à la contamination microbienne. Il est essentiel d'assurer la qualité des aliments destinés à la consommation humaine surtout des enfants en milieu scolaire car ils constituent des personnes à risque. La qualité sanitaire des aliments passe par le respect des bonnes pratiques d’hygiène et de fabrication lors de leur transformation et de leur distribution. L’objectif général de cette thèse est de caractériser les microorganismes, isolés des aliments d’origine animale et des écouvillons des mains des opératrices, et de proposer des moyens de lutte « biologiques ».
Pour cela, une enquête de terrain a été réalisée auprès de 137 opérateurs de cuisine à raison d'un opérateur par école, à l'aide d'un questionnaire créé sur la plateforme Epicollect5. L'entretien a montré que les opérateurs impliqués dans la transformation et la vente d'aliments aux écoliers sont des femmes (100 %). La plupart de ces opératrices ont un niveau d'éducation primaire et n'ont pas subi d'examen médical. Elles transportaient des aliments d'origine animale mélangés à d'autres types d'aliments. La friture et la cuisson ont été utilisées pour préparer ou transformer les aliments. L'observation directe a révélé que les aliments étaient produits dans un environnement insalubre. Les opérateurs ne portaient pas de gants pendant la manipulation des aliments, mais certains portaient des tabliers. Toutes les opératrices se lavaient les mains avec de l'eau et du savon (eau du robinet ou du puit) après être allés aux toilettes. Il n'y avait pas d'installation adéquate pour le lavage des mains. La majorité des opératrices utilisaient des planches à découper en bois. Dans l'ensemble, les exploitants du secteur alimentaire ne respectaient pas les bonnes pratiques d'hygiène et de fabrication dans les cuisines.
Les agents pathogènes peuvent contaminer les aliments lorsqu’ils sont produits dans les conditions d’hygiène et de production inadéquates. Des échantillons d’aliments et de surfaces ont été collectés pour apprécier leur contamination microbienne. Un total de 100 échantillons d’aliments composés de 40 poissons frits, 30 saucisses frites et 30 œufs cuits ; et 40 échantillons de surfaces (face palmaire de la main avant et après lavage) dans 20 écoles primaires a été collecté et les méthodes conventionnelles d’analyse microbiologique classique ont été utilisées pour dénombrer la flore totale, Escherichia coli, Staphylococcus aureus, les anaérobies sulfito-réducteurs (ASR) et rechercher Salmonella spp. L’identification des bactéries isolées a été confirmée par séquençage du gène codant pour l’ARNr 16S. L’étude a montré un taux de non-conformité à 100 % de tous les échantillons de poisson des écoles publiques sans cantines (PS-C) pour la flore totale. Des souches présumées d’Escherichia coli (38 %) et de Staphylococcus aureus (20 %) ainsi que 17 souches présumées de Salmonella ont été détectées dans les échantillons. Le séquençage des souches isolées a confirmé les Escherichia coli dans 100 % des cas mais Staphylococcus aureus n’était pas présent dans les échantillons et les souches se sont révélées être des staphylocoques à coagulase positive. Les souches de Salmonella ont été confirmées comme des Salmonella enterica subsp enterica pour 100 % des souches isolées. La présence de ces agents potentiellement pathogènes dans les aliments nécessite des études complémentaires pour évaluer les risques de toxi-infections auxquels les consommateurs sont confrontés.
En vue d’évaluer la résistance aux antibiotiques des souches d’Escherichia coli isolées des aliments et des écouvillons des mains des opératrices, 10 antibiotiques ont été sélectionnés pour effectuer l’antibiogramme de 55 souches d’Escherichia coli par la méthode de diffusion sur disque. Ensuite les gènes de virulence stx1, stx2 et eae ont été recherchés à l’aide de leurs amorces spécifiques dans les 55 souches d’Escherichia coli par PCR. Il ressort de cette étude que les isolats d’Escherichia coli ont exprimé des résistances variables. Pour la multirésistance aux antibiotiques 63,6 % (n=35) des isolats ont été résistants à au moins deux antibiotiques à la fois. La caractérisation moléculaire des gènes de virulence a montré la présence de stx1 dans 16,4 % (n=9) des isolats testés et l’absence de stx2 et eae dans tous les isolats.
Enfin, les activités antibactériennes des huiles essentielles (HE) du clou de girofle (Syzygium aromaticum), de l’ail (Allium sativum), du laurier (Pimenta racemosa) et du gingembre (Zingiber officinale) ont été évaluées sur les souches d’E. coli isolées des échantillons. Après identification botanique, les HE de ces quatre plantes ont été extraites par hydrodistillation à l’aide d’un appareil de type Clevenger suivi d’une caractérisation par GC/FID et GC/SM pour identifier les composés chimiques qu’elles renfermaient. Les HE caractérisées ont été testées sur les souches d’Escherichia coli par la méthode de diffusion sur disque à l’aide des disques stériles pour évaluer leurs activités antibactériennes sur les souches suivie de la détermination de leurs concentrations minimums inhibitrices (CMI) et concentrations minimums bactéricides (CMB) par la méthode de micro dilution de bouillon à l’aide du système Bioscreen C pour évaluer leurs propriétés bactériostatiques et, par culture sur la gélose nutritive, pour confirmer la bactéricidie. La caractérisation des HE a montré qu’elles renfermaient des molécules chimiques biologiquement actives sur les pathogènes. Les activités antibactériennes et la détermination des CMI et CMB ont révélé que toutes les HE étaient actives sur les souches testées avec des CMI comprises entre 1 et 2,5 mg/mL. L’HE de l’Allium sativum a été la plus active sur les souches testées.
Pour garantir une qualité microbiologique satisfaisante des aliments aux écoliers, des formations devraient être organisées pour sensibiliser les opérateurs aux bonnes pratiques d'hygiène et de fabrication dans les cuisines. Un intérêt particulier doit être accordé à ces plantes pour encourager leur culture et l’extraction de leurs HE afin qu’elles soient accessibles et disponibles pour leur utilisation en industries agroalimentaires. Les opérateurs de cuisine des écoles doivent être aussi sensibilisés sur les bienfaits de l’utilisation de ces épices lors de la préparation des aliments pour garantir des aliments sains aux écoliers.