Abstract :
[fr] « En el aire conmovido... »
6 novembre, 2024 - 17 mars, 2025
Madrid, Museo Reina Sofía y Centre de Cultura Contemporània de Barcelona (CCCB)
Commissaire : G. Didi-Huberman
Madrid, derniers jours de novembre. Traversée de l’Europe pour découvrir la nouvelle exposition imaginée par Georges Didi-Huberman, exposition au titre énigmatique et (littéralement) inspirant : « En el aire conmovido... » (dans l’air troublé, déplacé – André Belamich a proposé « la brise qui s’émeut », et Alice Becker-Ho « les airs commotionnés » ). J’ai déjà beaucoup fréquenté les idées et les livres de Didi-Huberman, et cette affinité – construite vaille que vaille – me pousse encore une fois à Madrid ; je ne voudrais pas manquer l’occasion de voir son dernier travail présenté au Reina Sofía. Et à la fois : qu’en dire, au retour ? Sinon qu’il a produit les effets de déstabilisation attendus. Mais quel exercice de partage engager à partir de là ? Comment décoller cette expérience du plan de ma seule sensibilité pour la traduire plus largement ? Comment ne pas, se faisant, redoubler une justesse trouvée, d’un brouillard qui dissiperait toute clarté – car souvent, les critiques rendent plus ardue encore la compréhension des propositions artistiques commentées. Quelle vanité auraient sinon les discours sur l’art, s’ils rendent plus confuse encore l’expérience esthétique. Je m’autoriserai d’abord à sortir un peu du cadre, ou plutôt, à le considérer pour lui-même, ce cadre : les textes de Fluxnews m’ont toujours parus enthousiastes et sans prétention (au sens positif de la formule). Il me semble qu’on ne perçoit jamais dans ce journal les travers de la critique d’art qui, s’étant professionnalisée, finit par se conformer à la rudesse attendue. Les critiques d’art qui proposent ici leurs textes n’ont pas le réflexe de se présenter en juges de ce qu’ils ont sous les yeux. J’avoue tenir vraiment à cet espace préservé des bastonnades intellectuelles et de la prise de pouvoir symbolique sur les impressions de chacun·e. Mais le risque n’est jamais nul. Et non plus le risque de rester à distance de l’expérience dont on veut parler, à force de mots trop choisis, inutilement sophistiqués. Et non plus celui de laisser à distance la lectrice ou le lecteur, qui ne demande pas à être snobé par un charabia inutile, mais qui cherche à simplement se laisser entrainer là où, cette fois-ci en tout cas, il n’était pas.
