Abstract :
[fr] L’identification d’un tournant spatial (“spatial turn”) au sein de la recherche sur le jeu vidéo (Güntzer, 2010) a vu fleurir d’autres manières d’aborder ce média. On dénote un intérêt de plus en plus croissant pour l’étude des différentes manifestations de l’espace au sein du jeu vidéo (GrandJean, 2020 ; Ter Minassian, Rufat, Borzakian, 2018 ; Perkins et. al., 2016 ; Stockburger, 2006, etc.). Néanmoins, ces travaux s’intéressent en général à la perception de l’espace, et bien que certaines recherches étudient la relation entre l’espace et l'impact des actions des joueur·euses sur celui-ci (Friche, 2020), une étude des mécaniques qui permettent de penser l’espace de manière actionnable
est souvent délaissée. Un travail de recherche sur ces sujets faciliterait ainsi la façon dont le médium vidéoludique amène à concevoir l'espace. Cette communication a ainsi pour objectif d'analyser la mécanique de voyage rapide dans les jeux vidéo, et comment celle-ci s'inscrit dans les diégèses narratives et les interfaces. Cette fonctionnalité met en tension un paradoxe spatial : comment une simple mécanique, ramenée à une micro-
interaction, permet de parcourir des espaces immenses en une fraction de seconde ?
Au prisme de cette fonctionnalité se trace effectivement une manière d'interagir avec le monde d'un jeu vidéo, et en particulier avec son espace fictif, ce qui l'inscrit dans le deuxième axe d'étude proposé par l'appel. Cette communication sera l'occasion de montrer que l’étude d’une fonctionnalité permet de penser l'espace, la narration, et l'expérience ludique de manière plus large au sein des game studies.
Pour le définir brièvement, le voyage rapide permet de se déplacer instantanément d’un endroit à l’autre de la carte, peu importe la distance entre les deux points. Les modalités du voyage rapide varient selon les jeux : de l’acquisition d’un pouvoir-faire ludique (Genvo, 2008) jusqu'à, par exemple, l'absence d'ennemis dans une zone définie autour de l'avatar contrôlée. Afin d'inscrire de manière pertinente cette communication au sein de l'appel, notre travail portera exclusivement sur le jeu Monster Hunter World et ses mécaniques de voyage rapides. Nous y montrerons comment cette fonctionnalité permet de penser différemment l'entièreté des enjeux ludiques, mais aussi d'explorer tout le paradoxe d'une « petite chose » permettant une modification drastique de l'expérience de jeu.
Notre méthodologie consistera en la réalisation une grille de lecture issue d’une analyse de contenu (Bouillaguet et. Al., 2007) qui nous permettra de synthétiser les différentes modalités de l’utilisation du fast travel au sein de notre corpus.
Cet outil permettra d’aborder, par le biais d’une approche communicationnelle et sémiotique dans le jeu (Genvo 2008, Grandjean 2020), différentes modalités d’inscription de la fonctionnalité du fast travel :
Tout d’abord d’un point de vue narratif par le biais de concepts clefs comme le narrataire-enquêteur (Ringot, 2020), puis d’un point de vue ludique via l’utilisation de schémas actantiels (Genvo, 2011), enfin de manière cartographique, en nous intéressant à la médiation par la carte (Harley, 1995, Moine, 2006, Plantin 2014).
Cette analyse exposera ainsi la logique de tension entre le microscopique et le macroscopique au sein du jeu.
Event organizer :
Centre de Recherche sur les médiations CREM - Université de Lorraine
Centre d'étude et de recherche Travail Organisation Pouvoir CERTOP - IUT de Tarbes
Centre Aixois d'Etudes Romanes CAER - Université d'Aix-en-Provence
MARGE - Université Jean Moulin Lyon 3
Equipe de Recherche Interdisciplinaire sur les Aires Culturelles ERIAC - Université de Rouen - Normandie