Abstract :
[fr] Désormais, le monde peut être découvert par internet et les enfants sont fascinés par les jeux électroniques. La plupart ne jouent plus dehors. On commence à mesurer les ravages de cette tendance sociétale : la perception empirique de l’environnement s’évanouit, les fantasmes et les peurs à l’égard de l’Autre prennent le pas sur la connaissance, de plus en plus d’enfants sont en surpoids et ont du mal à coordonner leurs mouvements, etc.
Pourtant, aller au contact avec la nature, avec la cité, dans la réalité tangible, est une expérience vitale pour le développement de l’enfant, que ce soit en famille ou à l’école. Connaître par l’expérience concrète, affiner ses capacités de perception, cultiver sa curiosité, développer sa sensibilité et son attachement à l’égard de son milieu de vie, évaluer la qualité de l’environnement et contribuer à son amélioration : ces apprentissages devraient idéalement se dérouler pour partie sur le terrain, dès la prime enfance, notamment à l’école.
Pratiquer « l’école du dehors » régulièrement engage les enseignants dans un autre paradigme que celui qui modèle leur quotidien « en classe », et exige dès lors une formation didactique spécifique. Dans la plupart des hautes écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles, mais aussi ailleurs dans le monde, des dispositifs de formation initiale d’enseignants du primaire intègrent cet objectif, principalement dans les cours d’éveil.
Mais malgré les conclusions positives des études sur les bénéfices de l’apprentissage hands-on sur le terrain, et malgré le fait que la majorité des enseignants s’y accorde (Southcott et Pyle, 2009), ce n’est pas pour autant que ce type de dispositif trouve une place effective dans les pratiques scolaires et les résultats de la formation initiale restent largement décevants : à l’issue de leurs études, peu d’étudiants envisagent de s’appuyer régulièrement sur les ressources du territoire environnant l’école pour concevoir des activités d’apprentissage.
La communication proposée présente une analyse des résistances au changement concernant la pédagogie de terrain, tant dans le chef des enseignants en fonction que des candidats enseignants du primaire en formation initiale.
Ces résistances au changement sont liées à des obstacles à l’apprentissage d’ordres divers : émotionnel, psychologique, cognitif, social, pédagogique, pragmatique et aussi d’ordre ontologique. Sont en jeu non seulement la vision de l’apprentissage et la vision de l’enfant, tout comme la vision de l’école dans la société et du métier d’enseignant, mais aussi la vision du monde et de la trajectoire de chacun dans la construction d’une identité écocitoyenne.
Cette analyse est un des résultats d’une recherche-action-formation menée par des formateurs d’enseignants à la Haute École Libre mosane de 2014 à 2018, en partenariat avec l’Institut d’Eco-pédagogie. Elle repose sur un état de l’art de la littérature en la matière et sur des données issues d’une part d’enquêtes auprès de formateurs en Fédération Wallonie-Bruxelles et d’observations empiriques menées par les formateurs-chercheurs de l’HELMo, d’autre part sur des enquêtes réalisées par l’Institut d’Eco-pédagogie auprès d’étudiants en formation initiale et auprès d’enseignants en formation continuée.
Les conclusions de cette partie de la recherche permettent d’échafauder un projet alternatif de formation à l’extramuros des enseignants, afin que les obstacles à l’apprentissage puissent être surmontés par les étudiants.