"Parle-moi du passé pour améliorer ma mémoire" : Effets des réminiscences parentales sur la mémoire épisodique d'enfants d'âge préscolaire

De nombreuses études ont démontré que la manière de discuter du passé avec son enfant – autrement dit, le style de réminiscence parentale – influence le développement de sa mémoire autobiographique (pour une méta-analyse, voir Wu & Jobson, 2019). Et si ces discussions influençaient également ses capacités en mémoire épisodique ? À ce jour, une seule étude le suggère (Langley et al., 2017). L’objectif de notre étude longitudinale est d’explorer quels éléments du style de réminiscence – tant du point de vue de la structure des interactions que du contenu abordé – contribuent à la performance mnésique d’enfants âgés de 3 à 5 ans (n = 53). Pour déterminer le style de réminiscence parentale, nous avons analysé une discussion à propos d’un événement standardisé préalablement vécu par chaque dyade parent-enfant (visite d’un aquarium). Pour évaluer les capacités mnésiques des enfants, des tâches de rappel d’histoire (lecture d’histoires suivies d’une reconnaissance en vrai/faux) leur ont été administrées en immédiat et environ 9 mois plus tard. Des analyses en clusters sur les scores de réminiscence parentale ont révélé l’existence de 2 clusters –peu élaboratif versus très élaboratif– qui diffèrent principalement sur les variables de contenu épisodique. Contrairement aux parents peu élaboratifs, les parents très élaboratifs se sont engagés dans des réminiscences plus riches (en s’attardant sur des éléments relatifs à l’événement – p. ex., des informations contextuelles – mais aussi des informations associées – p. ex., des connaissances générales) et ont davantage adopté un discours métamnésique. De manière intéressante, une ANCOVA à mesures répétées a montré un effet principal du cluster sur les performances mnésiques des enfants (p = .04). Plus précisément, les enfants de parents très élaboratifs ont fait preuve de meilleures capacités de discrimination entre les hits et les leurres et ce, indépendamment du moment d’évaluation. Ces résultats confirment ainsi l’influence des réminiscences parentales sur les capacités en mémoire épisodique des enfants d’âge préscolaire. La contribution majeure de notre étude est d’avoir mis en lumière le rôle de la richesse épisodique dans cette influence, la littérature existante se focalisant davantage sur le style communicationnel.