L’étude du décor, du façonnage et de la mise en œuvre de la pierre et son impact sur la compréhension du chantier gothique. Le cas de la nef et de la façade occidentale de la collégiale Notre-Dame à Dinant (XIVe-XVe siècle)

Au XIXe siècle, les premières publications scientifiques consacrées à l'architecture médiévale, fondées sur des critères typo-chronologiques, datent la construction de la nef de la collégiale Notre-Dame à Dinant de la seconde moitié du XIIIe siècle. Cette datation, proposée par Antoine Guillaume Bernard Schayes, fut ensuite reprise et affinée par le curé Evariste Hayot en 1950 sur base d'une libre interprétation de sources textuelles, dans un article monographique dont l'autorité n'a jamais été remise en question à ce jour. Cette chronologie peut désormais être réinterprétée en passant le monument au crible d'une analyse archéologique et stylistique dont l'originalité, pour le site, réside dans un étroit dialogue entre le décor sculpté (bases, colonnettes, chapiteaux, etc.) et les maçonneries ordinaires érigés en calcaire de Meuse, et dont les résultats sont mis en perspective avec l'érection des portails et certains éléments de second-œuvre. Cette méthodologie novatrice permet ainsi de proposer une nouvelle lecture du chantier médiéval, qui s'échelonne en plusieurs phases distinctes, non pas au XIIIe siècle, mais aux XIVe et XVe siècles. Elle apporte ainsi un éclairage bienvenu sur cette nef dont l'histoire de la construction primitive se heurtait jusqu'à présent à plusieurs obstacles, tels l’absence de sources écrites probantes, de charpentes primitives propices à la dendrochronologie, et enfin, la permanence des formes architecturales déjà adoptées dans le chœur et le transept au début du XIIIe siècle.