Genèse du style de Jerry Spring

« Je suis vraiment heureux dans un endroit où rien ne ressemble à ce que j’ai connu auparavant, les mœurs, le langage, le paysage... » Chez Jijé, le « nomadisme physique » se double d’un « nomadisme esthétique ». Son œuvre traverse de multiples territoires graphiques quand l’industrie des « illustrés » invite plutôt à toujours cultiver la même parcelle.

Venu à la bande dessinée avec une méconnaissance totale de ses usages, Joseph Gillain découvre les « adventure strip » étasuniens par le bais de ses élèves Morris et Franquin. Les productions d’Outre-Atlantique ont décliné les genres issus de la littérature populaire – le western en tête – et acclimaté la syntaxe cinématographique tout en forgeant des codes capables de s’adapter aux contraintes de production. L’esthétique de Milton Caniff, qui allie efficacité et élégance crépusculaire, s’érige en paradigme et se diffuse dans le monde entier.

Son influence sur Jijé n’est nulle part aussi prégnante que dans le cycle des aventures de Jerry Spring ou le « nomadisme esthétique » a fait place à une « graphiation » plus homogène. Le présent exposé tachera d’analyser cette bande dessinée à la lumière tant des incessantes expériences graphiques qui ont animé ses réalisations antérieures que des normes forgées dans les « adventure strip ».