Abstract :
[en] The research aims at contributing to a better understanding of the adoption of eco-friendly innovations. It analyses representations of environment and practices associated with sustainable management of cotton farming systems in order to deepen understanding of logics and strategies underlining farmers’ practices, and motivations that determine their sustainable farming system adoption behaviors. Organic cotton (SCBIO) and cotton made in Africa (SCMIA) systems were used as case study. Field research was carried out in Kandi and Pehunco in the largest area of cotton production in the North of Benin. The theoretical framework is based on the theories of technical change analysis, the actor-oriented approach and the theories of social representations. Data were collected from a sample of 90 organic cotton farmers and 100 CmiA farmers selected from a typology based on endogenous criteria of prosperity. 39 field agents from organizations promoting sustainable cotton farming system were surveyed. Individuals and groups interviews were used to collect data. The data were analyzed with a combination of qualitative and quantitative methods including normative and relative comparison analysis, perception analysis, descriptive statistics, analysis of variance, chi square test, etc. Results show a marginal contribution of organic cotton and cotton made in Africa to national economy in comparison to the conventional system. At farmer’s level farming system analysis reveals that both organic cotton and cotton made in Africa systems are not intensively sustainable. Their implementation is characterized by a large gap between recommendations and farmers’ practices, especially in soils’ fertility and pests’ management. The use of organic matters in combination with crops rotation including leguminous plants is the main approach of soils fertility management in organic cotton system. However, quantities of organic matters used, especially cow dung, are not sufficient due to its low availability and the lack of transportation means. The management of pests and diseases faces enormous constraints ranging from biopesticides production difficulties, weak efficiency of biopesticides, to observation of the evolution of parasitic complex, etc. Although the use of organo-chemical fertilizer is recommended in SCMIA system, more than 50% of SCMIA farmers apply only chemical fertilizer. Globally, the quantities of chemical fertilizer applied are under the requirements while the quantities of organic fertilizers are too small. Application of staged and targeted pest control (lutte étagée ciblée) is limited by constraints coming from the late implementation and the ineffectiveness of pesticides, the high number of observations needed, etc. Therefore, pesticides are used in overdose and prohibited pesticides such as endosulfan are also used. Consequently yields are very low and decrease. In addition, some farmers, especially from organic system, considering necessity of chemical fertilizers use for maize production develop diverse strategic logics such as misappropriation, craftiness, etc. to obtain these fertilizers. It appears from analysis that strategic logics carried out by farmers in farming systems’ adoption are the result of a combination of explanatory factors. These factors contribute to deepen the understanding of the weaknesses of organic and CmiA values chains in Benin and the bottlenecks in their development. Far from being static, farmers’ logics area temporary equilibrium resulting from different explanatory categories relative to social representations of environment, perceptions of projects and production and social reproduction objectives of farmers, the demand of sustainable cotton on international market, etc. Consequently, all actions aimed at promoting the sustainability of cotton farming system may facilitate access of farmers to inputs through the improvement of their existence means for a better soil fertility and pests management. Sensitization and training programs on the importance of leguminous plants integration to crops rotation, staged and targeted pest control, etc., may be carried out. At policy level it would be desirable that policies decisions don't negatively affect the development of alternative cotton value chains. In addition, measures may be taken to facilitate farmers’ access to chemical fertilizers for food crops, especially maize, to avoid their selling off.
[fr] La présente recherche vise à contribuer à une meilleure compréhension du phénomène d'adoption des innovations environnementales. Elle part de l’analyse des représentations de l’environnement et des pratiques culturales associées à la gestion durable des exploitations cotonnières afin de mieux saisir les logiques et stratégies qui les fondent d’une part ainsi que les raisons qui expliquent les comportements paysans dans l’adoption des systèmes alternatifs de production de coton (SAPC) au Bénin d’autre part. Les théories d’analyse du changement technique, plus particulièrement la théorie de l’appropriation des innovations, renforcée par la théorie orientée vers les acteurs et les considérations théoriques sur les logiques et stratégies d’acteurs et les représentations sociales, ont servi de fil conducteur.
Les systèmes de production de coton biologique (SCBIO) et du Cotton made in Africa (SCMIA) ont servi de cas d'étude. La phase empirique de la recherche s’est déroulée dans les communes de Kandi et de Péhunco, situées dans le bassin cotonnier du Nord Bénin. Un échantillon de 90 exploitants SCBIO, de 100 exploitants SCMIA et de 39 agents des structures promotrices de ces systèmes, a été constitué à partir d’une typologie à dires d’acteurs, conçue sur la base de critères endogènes de prospérité. Vu le caractère empirique de la recherche, une attention particulière a été accordée aux données primaires. Des outils qualitatifs et quantitatifs ont été combinés pour l’analyse des données collectées grâce à des entretiens individuels et de groupes.
Il ressort de l’étude que la contribution du SCBIO et du SCMIA à l'économie nationale reste marginale en comparaison au mode conventionnel, système pourtant décrié. Au niveau paysan, l'analyse de ces systèmes de production montre qu'ils ne sont pas durablement intensifs et leur appropriation est caractérisée par des divergences entre les exigences et pratiques recommandées et les pratiques paysannes. En particulier, la gestion de la fertilité des sols et des ravageurs reste problématique. En clair, l’utilisation de la matière organique et la pratique de la rotation intégrant des légumineuses constituent les principales formes de gestion de la fertilité des sols au sein des exploitations SCBIO. Cependant, les apports de la matière organique en quantité et en qualité restent limités par la faible disponibilité de la matière organique, le manque crucial de matériel de transport, les conditions de production de la fumure, etc. Par ailleurs, la difficulté liée à la préparation des biopesticides et leur efficacité réduite, les contraintes liées à l’observation du complexe parasitaire, etc. constituent d’énormes contraintes à une gestion efficace des ravageurs. Au niveau des exploitations SCMIA, la pratique de la fertilisation organo-minérale reste peu répandue ; les apports de fumure organique sont très infimes et ceux des engrais minéraux insuffisants. L'application de la lutte étagée ciblée (LEC), principale méthode de gestion des ravageurs, est limitée par des contraintes de mise en place tardive des insecticides, leur faible efficacité, la pénibilité de la méthode, etc. ; ce qui contraint les exploitants à l’usage de pesticides en surdose ou au recours aux pesticides prohibés tels que l’endosulfan. Jugeant de la nécessité de recourir aux engrais minéraux pour les vivriers, notamment le maïs, certains producteurs développent diverses logiques stratégiques pouvant revêtir la forme de ruse, de contournement, de non-respect des cahiers de charges, d'abandon, etc. en vue d'y accéder. L'analyse de ces logiques stratégiques a montré qu'elles constituent un équilibre provisoire, une résultante de différents registres explicatifs relatifs aux représentations sociales de l'environnement, à la perception des dispositifs de développement, aux objectifs de production et de reproduction sociale, à la particularité de la demande de coton « durable », etc. Dès lors, toute action visant la durabilité des systèmes de production de coton doit permettre l'amélioration des moyens d'existence des producteurs afin de favoriser leur accès aux intrants en quantité et en qualité suffisantes pour une meilleure gestion de la fertilité des sols et des ravageurs. Des actions de sensibilisation et de renforcement des capacités sur l’importance de l’intégration des légumineuses au système de rotation, l’amélioration de la méthode de la lutte étagée ciblée, etc. devront être envisagées. Au niveau politique, il serait souhaitable que les décisions politiques n’affectent pas négativement le développement de filières cotonnières alternatives. Il importe aussi que des mesures soient prises en vue de faciliter l’accès des exploitants aux engrais minéraux destinés aux cultures vivrières dont principalement le maïs afin d’éviter le bradage des vivriers.