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Abstract :
[fr] Le plurilinguisme est devenu la pierre angulaire des politiques éducatives linguistiques promues par le Conseil de l’Europe, et les programmes de mobilité étudiante Erasmus constituent un terrain privilégié pour la mise en place d’une éducation plurilingue et pluriculturelle. La nouvelle « génération Erasmus » s’incarnerait dans une figure d’étudiant humaniste, responsable et conscient de son rôle dans la construction d’une Europe plus citoyenne, et le rapport aux langues de cet étudiant cosmopolite serait à la fois la fin et le moyen de son évolution. En effet, l’immersion linguistique et culturelle liée à la mobilité serait l’occasion de développer des attitudes plus tolérantes vis-à-vis des langues et des locuteurs dans leur diversité. Au-delà d’une « culture éducative européenne partagée » se pose ainsi la question de l’incidence réelle des programmes de mobilité sur les apprentissages linguistiques et les attitudes des étudiants face à la diversité.
L’objectif de ce travail est d’interroger l’interaction entre les logiques institutionnelles européennes et les logiques individuelles des étudiants mobiles afin de nourrir la réflexion didactique. Pour ce faire, nous avons étudié d’une part les principes véhiculés par une sélection de textes européens et, d’autre part, les représentations que des étudiants Erasmus non francophones activent ou se forgent des langues et des pratiques langagières, à partir de praxis sociales et scolaires dans le cadre de leur séjour à Liège en Belgique francophone. Quelle(s) norme(s) ces discours (institutionnels et ordinaires) construisent-ils ? Quelles postures les acteurs de la mobilité étudiante adoptent-ils vis-à-vis des langues ? S’est également posée la question de l’évolution vs la fossilisation des contenus représentationnels à la suite de l’expérience Erasmus.
Nos analyses montrent que les déplacements paradigmatiques importants occasionnés par le passage à une vision plurilingue nécessitent des déplacements représentationnels non négligeables et qui ne vont pas de soi, tant au niveau institutionnel qu’individuel. Les postures adoptées par les étudiants se situent entre d’une part, l’acceptation d’une pratique plurilingue et sa normalisation/légitimation (nécessaire pour en faire une compétence) et, d’autre part, la pression normative intrinsèque aux langues, particulièrement au français et à sa tradition puriste. Les ethnotypes et les sociotypes observés témoignent de postures variées et fluctuantes : tantôt puriste, tantôt instrumentaliste, ou encore plus relativiste à certains égards, en accord avec le développement d’une identification et d’une compétence plurilingues. Suite à ces analyses, nous proposons plusieurs déplacements conceptuels pour une didactique du plurilinguisme mieux adaptée au contexte Erasmus : déterminer et prendre en considération des représentations normatives des acteurs de la mobilité au lieu de prétendre les neutraliser ; rendre une place de choix aux savoirs afin que les étudiants valorisent leurs compétences et se sentent en mesure de répondre aux exigences normatives, notamment celles des discours universitaires ; valoriser, voire certifier une compétence spécifique que nous avons observée et nommée compétence (métalinguistique) corrective qui participerait d’une posture à la fois normative et pragmatique, conjuguant ainsi le souci de la langue pour elle-même et pour ce qu’elle permet.
Title :
Les représentations linguistiques des étudiants Erasmus et la vision plurilingue européenne: normes, discours, apprentissages