Article (Scientific journals)
La figure du ministre ou le troisième corps du roi. Contribution à l’histoire des représentations et des matérialités politiques (Europe, première modernité)
Ferrer-Bartomeu, Jérémie
2025In Part de l'Oeil (La), 39, p. 235-249
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Keywords :
Louis Marin; troisième corps du roi; société administrative; arcana imperii; fresques de l’Escurial; négociations diplomatiques; rituel bureaucratique; iconographie funéraire; État moderne; performativité des images; transformation politique; souveraineté; pouvoir administratif; Henri III; Richelieu; Henri IV; Philip II d’Espagne; Somerset House; écriture et pouvoir; représentations visuelles et scripturales.
Abstract :
[fr] Cet article est issu d’une réflexion lors d’un colloque consacré à Louis Marin. J’y explore une notion centrale dans mes recherches actuelles, celle d’un « troisième corps du roi », soit la société administrative qui domine les structures de pouvoir au sein des autorités publiques européennes de la première modernité, articulée à travers quatre contextes historiques et iconographiques distincts. Je postule que ce troisième corps, distinct de la majesté royale et du corps politique organique, trouve sa légitimité dans une administration en pleine expansion et dans la performativité des représentations visuelles et scripturales. L’analyse débute avec l’administration royale sous Philippe II d’Espagne, incarnée dans les fresques de la salle des Batailles de l’Escurial. Ces œuvres montrent l’omniprésence graphique du roi, où la circulation des dépêches et le rôle des courriers reflètent une dimension pré-bureaucratique du pouvoir. Le courrier de la bataille de Gravelines devient une métaphore visuelle du rôle de l’écrit et des négociations dans la consolidation des conquêtes militaires. Ce détail met en lumière la transition entre le pouvoir de l’aristocratie de service et le pouvoir des bureaux, où l’information et la gestion des territoires par l’écrit prennent une place centrale. Le tableau de la conférence de Somerset House (1604) introduit la dimension diplomatique, montrant comment le papier d’État symbolise la légitimité et le mandat royal dans les négociations. La composition, tout en suggérant l’absence des souverains, reflète un rapport complexe au temps politique, où l’écrit cristallise l’autorité et les tensions entre les différentes délégations. L’analyse met en évidence l’importance des instruments d’écriture et des rituels bureaucratiques dans la mise en scène du pouvoir. Les cas de la cérémonie de l’Ordre du Saint-Esprit sous Henri III et du portrait de Richelieu par Philippe de Champaigne illustrent l’évolution des représentations de l’administration. Sous Henri III, les rituels associés aux papiers d’État révèlent une structuration consciente des pratiques administratives et symboliques. Avec Richelieu, la figure du ministre au travail, entouré des instruments de l’écrit, devient une incarnation des arcanes de l’État, montrant la tension entre la sacralité du pouvoir royal et la montée en puissance des administrations. Enfin, l’étude de l’effigie funéraire d’Henri IV, portant le sceau royal, synthétise ces dynamiques en montrant comment l’iconographie funéraire réactualise le paradoxe du roi vivant et mort, avec l’écrit comme garant symbolique de la continuité du pouvoir. Le sceau, signe de la présence administrative, révèle l’émergence d’une conception bureaucratique de l’État, même dans la mort. Je conclus que ces représentations visuelles et scripturales articulent une dialectique entre le matériel et l’idéel, consolidant la légitimité de l’administration dans un contexte de transformations politiques et religieuses. Ce troisième corps du roi, par ses discours et pratiques, devient un vecteur de l’État moderne, intégrant les tensions et les imaginaires qui fondent l’autorité souveraine. Mon article ouvre ainsi de nouvelles perspectives pour comprendre la performativité des images et des rituels dans la construction de l’État administratif à l’époque moderne.
[en] This article is derived from reflections during a colloquium dedicated to Louis Marin, and it explores a central concept in the present author's current research, namely the 'third body of the king'. This is understood as the administrative society that dominates power structures within early modern European public authorities.The concept is articulated through four distinct historical and iconographic contexts. The argument is posited that this third body, distinguishable from the royal majesty and the organic political body, derives its legitimacy from an expanding administration and the performativity of visual and textual representations.The analysis commences with the royal administration under Philip II of Spain, as depicted in the frescoes of the Hall of Battles at the Escorial. The frescoes illustrate the graphical omnipresence of the king, and the circulation of dispatches and the role of couriers reflect a pre-bureaucratic dimension of power.The courier from the Battle of Gravelines becomes a visual metaphor for the role of written communication and negotiations in consolidating military conquests, thereby highlighting the transition from the power of the service aristocracy to that of administrative offices, where information and territorial management through writing take centre stage. The painting of the Somerset House Conference (1604) introduces the diplomatic dimension, showing how state papers symbolize legitimacy and royal mandate in negotiations.The composition, while suggesting the absence of the sovereigns, reflects a complex relationship with political time, where written documents crystallize authority and tensions between the delegations.The analysis underscores the importance of writing instruments and bureaucratic rituals in staging power. The evolution of administrative representations is illustrated by the cases of the Order of the Holy Spirit ceremony under Henry III and the portrait of Richelieu by Philippe de Champaigne.The rituals associated with state papers reveal a conscious structuring of administrative and symbolic practices under Henry III. Richelieu, the minister at work, surrounded by the instruments of writing, becomes an embodiment of the arcana imperii, highlighting the tension between the sacrality of royal power and the rise of administrations. Finally, the study of Henry IV's funerary effigy, bearing the royal seal, synthesises these dynamics by demonstrating how funerary iconography reactivates the paradox of the king as both living and dead, with writing as the symbolic guarantor of the continuity of power.The seal, as a sign of administrative presence, reveals the emergence of a bureaucratic conception of the state, even in death. The conclusion drawn is that these visual and textual representations articulate a dialectic between the material and the ideal, thereby consolidating the legitimacy of administration within a context of political and religious transformations. This third body of the king, through its discourses and practices, becomes a vector of the modern state, integrating the tensions and imaginaries that underpin sovereign authority.The article thus opens new perspectives for understanding the performativity of images and rituals in the construction of the administrative state in the early modern period.
Disciplines :
History
Languages & linguistics
Author, co-author :
Ferrer-Bartomeu, Jérémie  ;  Université de Liège - ULiège > Transitions - Unité de recherches sur le Moyen Âge et la première Modernité
Language :
French
Title :
La figure du ministre ou le troisième corps du roi. Contribution à l’histoire des représentations et des matérialités politiques (Europe, première modernité)
Alternative titles :
[en] The Figure of the Minister or the King's Third Body: A Contribution to the History of Political Representations and Materialities (Early Modern Europe)
Publication date :
01 March 2025
Journal title :
Part de l'Oeil (La)
ISSN :
0773-9532
Publisher :
La Part de l'Oeil, Bruxelles, Belgium
Special issue title :
Lire, décrire, interpréter. Louis Marin entre texte et image
Volume :
39
Pages :
235-249
Peer reviewed :
Peer reviewed
Funders :
FWB - Fédération Wallonie-Bruxelles
Available on ORBi :
since 05 January 2025

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