Le cours de Philosophie et Citoyenneté en Belgique : paradigme critique et conflits de loyauté

La Communauté française de Belgique (Fédération Wallonie-Bruxelles) a fait le choix d’instaurer en 2016 un nouveau cours obligatoire dans l’enseignement officiel, en remplacement d’une heure de morale non confessionnelle ou de religion : le cours de Philosophie et citoyenneté, qui allie éthique, éducation à la citoyenneté et philosophie, et qui s’adresse à toutes et tous de la première primaire à la dernière année du secondaire. En élisant la philosophie comme discipline maîtresse insufflant ses méthodes et ses concepts à l’ensemble du cours, elle a également promu – en partie malgré elle - une posture critique propre à inquiéter les discours normatifs d’une certaine éducation à la citoyenneté. Loin des leçons de civisme, le cours de Philosophie et citoyenneté belge a pour vocation d’interroger toutes les normes et de soulever des questions éthiques sans en présumer l’issue. Bien que le cours se dise non engagé (contrairement aux cours de religions qui existent en Belgique francophone) et relève d’ailleurs du Décret « Neutralité », le paradigme critique qui le sous-tend n’est pas neutre : il a son histoire, ses auteurs et autrices, son épistémologie et ses principes. Nous tâcherons de mettre au jour ce cadre de pensée implicite dans les programmes et référentiels du cours, mais aussi de montrer, à travers quelques études de cas issus de nos observations dans les classes du secondaire supérieur, comment ce paradigme peut se heurter à d’autres modèles éthiques, créant des conflits de loyauté et des réticences chez certain·e·s élèves.