Abstract :
[fr] La compréhension des mécanismes qui régissent les interactions entre les micro-organismes du sol est primordiale pour le développement de nouveaux produits de biocontrôle basés sur ces microorganismes. Le champignon Trichoderma harzianum IHEM5437 et la bactérie Bacillus velezensis GA1, productrice de trois familles de lipopeptides, les surfactines, les fengycines et les iturines, sont exploités pour leur potentiel dans la lutte contre les phytopathogènes. Dans ce travail, différentes stratégies de coculture de ces deux microorganismes ont été testées afin de déterminer leur influence sur les interactions entre ces derniers. L’inoculation au même moment des deux souches dans un milieu riche contenant tous les éléments nécessaires à leur croissance, conduit au développement de la bactérie au dépriment du champignon, grâce à son rythme de croissance plus rapide et surtout à la production des lipopeptides antifongiques qui inhibent la croissance du Trichoderma. L’utilisation de mutants incapables de produire l’un ou l’autre de ces lipopeptides a permis de montrer que cette activité antifongique dirigée contre Trichoderma est principalement due à l’iturine et à la fengycine. L’inoculation séquentielle de Trichoderma suivi par Bacillus permet de résoudre partiellement ce problème. Toutefois, dans cette approche, la production de lipopeptides par B. velezensis GA1 persiste et fini par intérférer avec la croissance de Trichoderma. Également, le développement préalable du champignon entraine un épuisement des nutriments qui impacte la croissance de Bacillus. L’utilisation d’un milieu contenant du nitrate comme seule source d’azote modifie complètement les interactions entre les deux partenaires. Dans ces conditions de coculture, une dépendance nutritionnelle entre le champignon et la bactérie a été observée. En effet, Bacillus velezensis, est incapable de se développer seul sur ce type de milieu suite à l’absence dans son génome du gène codant la nitrite reductase qui permet la transformation du nitrate en nitrite. Trichoderma, dont la croissance est favorisée en présence de nitrate, produit après 5 jours de culture des composés azotés assimilables par la bactérie, permettant, donc, la croissance de cette dernière. Par ailleurs, dans ces conditions de coculture, l’expression des gènes qui codent pour les synthétases nonribosomiques impliquées dans la synthèse des lipopeptides est réprimée. Cette répression lève l’inhibition de croissance du Trichoderma et permet donc dans la durée un développement des deux souches en coculture. Enfin, la coopération observée entre ces deux microorganismes nécessite leur présence en coculture car un surnageant de culture de Trichoderma seul obtenu dans ce même milieu avec nitrate, ne provoque pas de répression de l’expression de ces gènes. Ces travaux ont donc montré l’existence d’un dialogue complexe entre Trichoderma harzianum et Bacillus velezensis en présence de nitrate qui requiert d’être décrypté afin d’évaluer ses potentialités d’exploitation dans des applications de biocontrôle des maladies des plantes.
[en] Understanding the mechanisms that govern interactions between soil microorganisms is essential for the development of new biocontrol products based on these microorganisms. The fungus Trichoderma harzianum IHEM5437 and the bacterium Bacillus velezensis GA1, producer of three families of lipopeptides, surfactins, fengycins and iturins, are exploited for their potential in the control of phytopathogens. In this work, different coculture strategies of these two microorganisms were tested in order to determine their influence on the interactions between the cocultivated species. The inoculation at the same time of the two strains in a rich medium containing all the required elements for their growth leads to the development of the bacteria that inhibits the growth of the fungus, thanks to its faster growth rate and especially to the production of antifungal lipopeptides. The use of mutants unable to produce either of these lipopeptides has shown that this antifungal activity against Trichoderma is mainly due to iturin and fengycin. Sequential inoculation of Trichoderma followed by Bacillus partially resolves this problem. However, in this approach, the production of lipopeptides by B. velezensis GA1 persists and eventually interferes with the growth of Trichoderma. Also, the prior development of the fungus leads to a depletion of nutrients which impacts the growth of Bacillus. The use of a medium containing nitrate as the sole source of nitrogen completely changes the interactions between the two partners. Under these coculture conditions, a nutritional dependence between the fungus and the bacteria was observed. In fact, Bacillus velezensis is unable to develop on its own in this type of medium due to the absence in its genome of the gene encoding nitrite reductase which allows the transformation of nitrate into nitrite. Trichoderma, which growth is favored in the presence of nitrate, produces after 5 days of culture of nitrogen compounds which can be assimilated by the bacteria, thus allowing the growth of the latter. Furthermore, under these coculture conditions, the expression of the genes encoding for the nonribosomal synthetases involved in the synthesis of lipopeptides is repressed. This repression removes the inhibition of growth of Trichoderma and therefore allows the development of the two strains in coculture over time. Finally, the cooperation observed between these two microorganisms requires their presence in coculture because a culture supernatant of Trichoderma alone obtained in this same medium with nitrate, doesn’t lead to the repression of the expression of these genes. This work has therefore shown the existence of a complex dialogue between Trichoderma harzianum and Bacillus velezensis in the presence of nitrate which needs to be deciphered in order to assess its potential for exploitation in plant disease biocontrol applications.
Jury member :
Declerck, Stephane; UCL - Université Catholique de Louvain [BE]
Fontaine, Florence; Université de Reims Champagne-Ardenne
Deveau, Aurélie; Université de Lorraine