Abstract :
[fr] Marquée par la crise sanitaire du coronavirus, la première saison du Trinkhall museum, « Visages/frontières », a été l’occasion d’affermir le positionnement du musée. D’abord, en assumant pleinement l’héritage du fondateur du Créahm, Luc Boulangé, dont l’action – organiser des ateliers de création, à destination de personnes en situation de handicap, non dans une perspective thérapeutique ou occupationnelle, mais exclusivement artistique – revêt une dimension non seulement artistique et culturelle, mais également politique. Le Trinkhall museum, lui aussi, situe son engagement à ce triple niveau. Ensuite, en renonçant à toute entreprise de catégorisation. La diversité des œuvres et le fil rouge des ateliers – dont émanent toutes les pièces de la collection – empêchent d’inscrire la collection du Trinkhall dans la catégorie de l’art brut ou de ses dérivés. Seule la fragilité semble être communément partagée par les artistes de la collection – une fragilité, cependant, qui n’est pas synonyme de faiblesse. C’est pourquoi le musée célèbre « la puissance expressive des mondes fragiles » et fonde sa politique sur une inversion des regards : ne plus regarder la collection avec les yeux du monde de l’art, mais regarder le monde avec les yeux de la collection. Ainsi, la collection constitue le terrain et l’instrument d’une enquête ; elle est le lieu d’où nous partons pour appréhender le monde et, sans aucun dogmatisme, apporter aux questions que nous posons des réponses inédites et sensibles. Enfin, en adoptant un dispositif d’accroissement de la collection lui aussi respectueux des œuvres et des artistes. En ce sens, une des priorités du musée est de protéger des créations souvent menacées par la destruction – les ateliers ne disposent pas des structures nécessaires à la conservation – ou par la prédation de galeristes peu scrupuleux.