Abstract :
[fr] Introduction : Au cours de leur carrière, plus de la moitié des enseignants développent des troubles de la voix (Van Houtte et al., 2011). Il s’agit principalement de phonotraumatismes consécutifs à une surcharge vocale, favorisant des patterns phonatoires dysfonctionnels (Martins et al., 2014). Ce travail vise à identifier les facteurs individuels qui prédisent l’augmentation de la charge vocale.
Méthode : 87 enseignants ont porté un dosimètre durant une semaine de travail (Figure 1). Ce dispositif permet le monitoring du comportement phonatoire à l’aide d’un capteur de vibration des plis vocaux. Les paramètres de charge vocale analysés toutes les 200 ms sont : la durée de phonation, l’intensité et la fréquence fondamentale de la voix (F0). Les caractéristiques individuelles suivantes des participants ont été étudiées : genre, âge, nombre d’années de carrière dans l’enseignement, niveau enseigné (Tableau 1), consommation de tabac, présence de problèmes gastro-œsophagiens, pratique d’un loisir sollicitant l’usage de la voix, éducation vocale, problèmes vocaux passés, présence de plaintes vocales au moment de l’étude évaluée avec le Voice Handicap Index (VHI) (Woisard et al., 2004). Afin de déterminer l’effet des facteurs individuels sur les paramètres de charge vocale, des modèles linéaires mixtes ont été utilisés.
Résultats : Aucun facteurs individuel n’influence la durée de phonation ni l’intensité vocale. Par contre, F0 dépend significativement du genre, du niveau enseigné, de la pratique d’un loisir sollicitant l’usage de la voix, et du score au VHI. Plus précisément, F0 est plus élevée pour les femmes que les hommes (Δ=68 Hz), pour les individus ne pratiquant pas de loisir vocal (Δ=10 Hz), et pour ceux ayant un score élevé au VHI (augmentation de 0,7 Hz pour chaque point supplémentaire au VHI). Le niveau enseigné impacte la F0 des femmes uniquement. Les enseignantes des universités ont une voix plus grave que celles du maternel (Δ=58 Hz), du primaire (Δ=44 Hz), et du secondaire (Δ=31 Hz).
Conclusions : Sachant que l’élévation de F0 augmente les stress mécaniques liés à la vibration, les individus à risque de phonotraumatismes sont les femmes et particulièrement celles qui enseignent dans les niveaux inférieurs, ainsi que les enseignants auto-rapportant des plaintes vocales. La voix plus grave des participants ayant une activité extra-professionnelle vocale pourrait s’expliquer par une inflammation aigue ou une fatigue musculaire liée à la surcharge vocale (Remacle et al., 2018). Ces informations aident à identifier les enseignants à cibler dans les programmes de dépistage et de prévention des problèmes vocaux.