Abstract :
[fr] Au départ d’une enquête de terrain de près de quatre années, la thèse présentée examine la condition des jeunes Noirs au sein de la région urbaine de Liège (Belgique francophone). Après une contextualisation socio-historique de la présence africaine subsaharienne en Belgique et une discussion portant sur la notion de « condition noire », les matériaux recueillis sont analysés à la lumière des travaux interactionnistes – principalement ceux d’Erving Goffman –, auxquels sont associées les recherches sur les relations interethniques, la socialisation, et les théories de la reconnaissance. En plus de constater la présence de discriminations, cette analyse permet également de relever l’existence d’un second phénomène, considéré comme distinct du premier : celui des interactions ethno-raciales difficiles en face à face. La thèse s’attache alors à étudier l’important travail de figuration réalisé par les individus noirs dans le cadre de telles interactions, de même que les adaptations produites au quotidien pour préserver la civilité dans les contacts et rencontres mixtes. Enfin, la recherche doctorale examine plus particulièrement deux ressources mobilisées par les jeunes Noirs pour tenter de faire face, à plus long terme, aux difficultés interactionnelles : le krump, danse urbaine soutenant le déploiement d’une citoyenneté interactionnelle chez ses pratiquants, et les bandes de jeunes, visant davantage, par le repli dans un entre-soi protecteur et la crainte suscitée chez autrui, à une reconnaissance interactionnelle.
[en] Based on fieldwork carried out over a period of nearly four years, this doctoral thesis investigates the condition of young Blacks in the urban region of Liège (French-speaking Belgium). Following a socio-historical contextualization of the sub-Saharan African presence in Belgium and a discussion of the notion of the “black condition”, the research draws on interactionist theories – most notably Erving Goffman’s work – as well as on current research into interethnic relations, socialization and recognition to analyze field materials. In addition to emphasizing the presence of discriminations, the analysis also brings to light the existence of a second, separate phenomenon: difficult face-to-face ethno-racial interactions. The research then highlights the substantial face work which black individuals make use of in such interactions, and the adaptation mechanisms they resort to in an effort to preserve civility in mixed daily contacts and encounters. Two resources are more closely examined, through which individuals attempt to cope with interactional difficulties in the longer term: krumping, an urban dance fostering interactional citizenship among practitioners, and youth gangs, which enable their members to seek more of an interactional recognition through withdrawal into a protective and awe-inspiring peer-group.