Redistribution du sol au sein d’un bassin versant agricole : méthodes de mesure novatrices et essai de modélisation

L’érosion de terres agricoles crée d’importants problèmes environnementaux dans la ceinture loessique européenne et induit des schémas de redistribution de sol à l’échelle du paysage. Ces schémas sont complexes mais leur connaissance est pourtant nécessaire à la lutte contre l’érosion des terres accélérée et non contrôlée, et dans ce but, des modèles spatialement distribués sont largement utilisés. Or, ceux-ci doivent s’appuyer sur des données de terrain notamment à l’échelle du bassin versant et à de hautes résolutions, actuellement peu disponibles car coûteuses et chronophages. Cette carence réclame le développement de nouvelles approches d’acquisition de données de terrain.
Cette thèse multiplie les méthodes de mesure pour évaluer les évolutions d’altitude spatialisées au sein d’un bassin versant. Un bassin versant limoneux (116 ha) de Belgique centrale majoritairement cultivé a été étudié.
La fiabilité de la technique de photogrammétrie sur base d’images acquises par drones a été évaluée pour sa première application dans un contexte d’érosion diffuse. Les MNS (modèles numériques de surface) de très hautes résolutions délivrés (pixels de 6 cm) permettent de calculer des chemins d’écoulements très précis. Leur comparaison à deux ans d’intervalle identifie des tendances de l’érosion vers le dépôt au sein des pentes. Toutefois, à l’échelle du bassin versant, des développements dans les étapes de traitement des données acquises par drones sont requis et sont déjà en pleine expansion.
Étant donné la haute variabilité inter-annuelle de l’érosion, des mesures sur quelques décennies sont également importantes. L’actualisation de la carte des sols de 1956 indique qu’une grande proportion de sols classifiés comme non érodés en 1956 sont fortement érodés en 2015 (52 % du bassin contre 8 % en 1956). Certaines zones de colluvions ont été temporairement sujettes à l’érosion puis recouvertes à nouveau par des colluvions au cours des 60 ans. Seules les zones les plus planes près des limites de bassin restent dans la catégorie des sols non érodés ou soumis à faible érosion. Une moyenne des taux d’érosion nets (37t/ha.an) a pu être calculée en comparant les deux cartes, ce qui classe cette technique parmi les rares permettant une spatialisation quantitative de l’érosion/dépôt à l’échelle du bassin versant.
Pour répondre au mieux à l’objectif de connaissance de l’érosion, un modèle de type expert - c.-à-d. dont les règles sont établies par expertise - (LandSoil) a été adapté sur base du suivi régulier de terrain et testé par courtes périodes de temps. Dans ce modèle, peu d’évènements génèrent du ruissellement ou des évolutions d’altitude. Par contre, quand il en modélise, les quantités modélisées sont plus importantes, ce qui laisse supposer une meilleure représentation de la réalité lors des simulations sur de longues échelles de temps. Par ailleurs, les schémas d’évolution d’altitude de LandSoil permettent de montrer qu’en fonction de la période de l’année, le modèle accorde plus d’importance tantôt à l’effet parcelle, tantôt à l’hydrologie et l’érosion concentrée.