Abstract :
[fr] Dès sa publication en 2004, l’ouvrage de l’auteur chilien Jorge Edwards El inútil de la familia a suscité de nombreuses questions. Bien que le texte se présente comme la biographie de l’oncle de Jorge Edwards, Joaquín Edwards Bello, lui aussi écrivain, des éléments fictionnels mettent à mal l’interprétation référentielle de l’œuvre. En plus du mélange réalité/fiction, certains critiques ont perçu, derrière la pseudo-biographie de l’oncle, l’autobiographie du neveu. En 2007, Manuel Alberca Serrano inclut El inútil de la familia dans l’inventaire d’autofictions hispano-américaines qui constitue l’appendice de son ouvrage El pacto ambiguo. De la novela autobiográfica a la autoficción. Étonnée par cette classification, nous avons cherché à déterminer plus précisément le genre de l'œuvre.
La réflexion menée dans notre mémoire s’articule autour de deux axes. D’une part, nous avons cherché à déterminer quel était le pacte de lecture proposé par El inútil de la familia, c'est-à-dire si le lecteur était amené à en faire une lecture référentielle ou fictionnelle. D’autre part, nous avons examiné les relations qui unissent les versants biographique et autofictionnel de l’œuvre d’Edwards, les personnages de Joaquín et de Jorge, la troisième et la première personne du récit. Pour répondre à ces questions, nous nous sommes demandé si El inútil de la familia répondait aux exigences des quatre genres que sont la biographie, l’alterfiction, l’autofiction et l’autoalterbiographie1. Cependant, l’examen des caractéristiques qui rapprochent ou éloignent l’œuvre d’Edwards d’un genre ou de l’autre ne visait pas à déterminer une fois pour toutes la catégorie à laquelle elle appartient, mais devait plutôt nous permettre de mieux comprendre le jeu de brouillage générique délibérément mis en place par l’auteur.
L'analyse narratologique nous a permis de montrer que l’œuvre d’Edwards reposait sur un pacte de lecture profondément ambigu, ce que suggérait déjà l’analyse du paratexte, et que, sous l'apparence d'une biographie de Joaquín Edwards Bello, El inútil de la familia réserve une place de choix au personnage de Jorge qui, imposant sa voix narrative tout au long du récit, en devient le véritable protagoniste.
Il nous semble dès lors que l’autoalterbiographie est peut-être l’étiquette qui conviendrait le mieux à l’œuvre de Jorge Edwards, mais l’enfermer dans une case générique reviendrait à réduire la complexité de l’œuvre qui comprend, à côté de ceux qui ont été explorés dans notre mémoire, d’autres genres que notre analyse a dû laisser de côté, tels que la critique littéraire ou l’essai. Notre étude n’a donc pas épuisé la question de l’hybridité générique de El inútil de la familia.
Degree :
Master en langues et littératures françaises et romanes, orientation générale, à finalité didactique