La défense des frontières et le développement des voies de communication en Belgique (1831-1860)

La naissance de l’État belge a été accompagnée pratiquement en parallèle du développement d’un vaste réseau de routes et de chemins de fer destiné à développer l’économie du pays. Ce réseau n’était pas seulement à usage interne mais devait permettre aux marchandises de circuler plus facilement d’un pays à l’autre. Il devait permettre aussi aux hommes d’affaires de se déplacer plus rapidement pour étendre leurs activités à l’étranger. Cette révolution extraordinaire des voies de communication a engendré indéniablement une nouvelle manière de percevoir la frontière. Dans l’esprit des milieux économiques, ces échanges commerciaux entre pays étaient certes synonymes de profits personnels mais pas seulement. Ils étaient aussi annonciateurs d’une ère nouvelle de paix puisque les États, enrichis par leurs relations mutuelles, n’auraient plus aucun intérêt à se faire la Guerre : « le commerce, c’est la paix ». Quelle fut au final la réaction du milieu militaire belge face à cette conception pacifiée de la frontière, conçue jusqu’à présent davantage comme une limite à défendre que comme un lieu d’échange ? Une bonne manière d’aborder cette vaste question est de s’intéresser aux commentaires qui accompagnèrent la création des nouvelles routes et lignes de chemins de fer traversant la Belgique. Dans la mesure où le territoire belge a toujours été considéré par les écrivains militaires comme le théâtre par excellence des guerres européennes, l’analyse de leurs considérations stratégiques confrontées à la « nécessité du progrès économique » est susceptible de fournir des pistes de réflexion intéressantes dans le domaine des border studies.