Geräusch, Gerücht, Gerede. Formen und Funktionen der Fama in Erzähltexten Theodor Storms und Arthur Schnitzlers

Dans sa représentation allégorique de Fama, le poète latin Ovide évoque trois phénomènes précis : son aspect acoustique (le bruit), sa forme discursive (les racontars) et son lien au récit (la rumeur). Alors que ces phénomènes ont très souvent fait l'objet d’études sociologiques et anthropologiques, il s’agit ici de les étudier en tant qu’objets d’un processus d’esthétisation. La thèse vise ainsi à décrire une « poétique de Fama » par l’analyse d’un choix de textes narratifs des auteurs germanophones Theodor Storm (1817 – 1888) et Arthur Schnitzler (1862 – 1931). En effet, les recherches récentes sur l’anticipation de la psychologie et sur les questions de perception chez Storm soulignent l’importance de stratégies narratives au caractère indirect, voilé et mettant à mal la plausibilité ; elles révèlent la nécessité d’étudier la rumeur comme élément thématique mais aussi structurel et formel. Les nombreux aspects de Fama intimement liés aux processus narratifs (polyphonie, psychologisation, contournement de la censure) permettent ensuite de confronter les textes de Storm à ceux de Schnitzler et d'y préciser les interactions subtiles entre bruit, racontars et rumeur. Dans ce traitement littéraire de Fama, il s’avère en outre primordial de mettre en lumière ses multiples fonctions selon les différents niveaux textuels (personnages, narrateur, auteur) et d’accorder une place au lecteur qui, dans une approche interactionnelle du récit, prend souvent part à la communication rumorale. Ces distinctions permettent de mettre en exergue la dimension poétologique de Fama dans ses différentes formes : si celle-ci participe à la création d’effets paradoxaux et de structures équivoques au sein des textes, c’est parce que la rumeur, en tant que forme de narration à caractère ambivalent et protéiforme, est fortement autoréflexive. L’instabilité et la contingence, l’indétermination de seuils et de frontières sont autant de traits qui caractérisent non seulement la rumeur et les racontars mais aussi les textes d’une époque marquée par de grandes mutations et par la mise en doute de valeurs et données acquises jusque-là.