Abstract :
[fr] Dans cette contribution, nous présentons une des découvertes que nous avons faites en
étudiant la ponctuation des chartes écrites à Liège entre 1236 et 1291. Il s’agit de faire le
résumé d’une méthode et description de la ponctuation médiévale (dans ses relations avec la
syntaxe, cf. Boutier 2001) et de montrer son intérêt.
§1. Dans un premier temps, nous définissons empiriquement la proposition comme
une structure syntaxique organisée autour d’un verbe assumant la fonction de prédicat. Nous
sommes ensuite amené à distinguer les phrases (qui jouent le rôle d’énoncé complet) des
subordonnées, puis à séparer ces dernières en deux groupes, suivant leur fonction syntaxique :
propositions actancielles (actant ou circonstant) et non actancielles (p. ex., relative).
§2. Nous examinons alors la fréquence de présence de ponctuation de part et d’autre
des constructions (attestées dans notre corpus) que nous pouvons ranger dans l’un ou l’autre
des groupes définis en 1. L’examen révèle une différence significative dans la fréquence de
marquage des trois types de structures : les phrases sont les unités qui sont le plus souvent
ponctuées, puis viennent les propositions actancielles, et celles de fonction non actancielle.
§3. La gradation découverte au point 2 ne tient pas compte des propositions incidentes,
qui ne sont pas introduites par un subordonnant, pourraient jouer le rôle d’un énoncé, mais
sont manifestement enchâssées dans une structure plus large. Une nouvelle série de tests sur
les fréquences de ponctuation permet de constater que ces propositions particulières occupent
une position intermédiaire entre la phrase et les subordonnées de fonction actancielle.
Les phénomènes observés inclinent à penser que l’analyse traditionnelle, qui découpe
les textes anciens en phrases, correspond assez bien à la manière dont les scribes eux-mêmes
les comprenaient. D’autre part, la ponctuation originale est un témoins précieux pour
apprécier la conscience linguistique des praticiens. Au travers des « unités de lecture »
(Marchello-Nizia 1978) qu’elle marque, la ponctuation permet d’entrevoir la langue.
BOUTIER Marie-Guy (2001). « Études sur des chartes luxembourgeoises », dans Gärtner Kurt
et al. (éd.) Skripta, Schreiblandschaften und Standardisierungstehenzen. Urkundensprachen
im Grenzbereich von Germania und Romania im 13. und 14. Jahrhundert.Trier. – MARCHELLO-
NIZIA Christiane (1978). « Ponctuation et “unités de lecture” dans les manuscrits médiévaux
ou : je ponctue, tu lis, il théorise », dans Langue française 40. – MAZZIOTTA Nicolas,
« Inconstance ou consensus ? Ponctuation et protase dans les chartes écrites en français à
Liège avant 1271 », à paraître dans les Actes du XXIVe CILPR, Aberystwyth, 1er-6 août 2004.