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Abstract :
[fr] Un boeing de la Lufthansa immobilisé sur le tarmac de l’aéroport de Mogadiscio, la vidéo de l’otage Hanns Martin Schleyer filmé par ses ravisseurs de la Fraction Armée Rouge, quelques cadavres bâchés dans des décors vides de banlieues cossues, telles sont les images d’archives qui aujourd’hui illustrent l’ensemble des années de plomb allemandes. Qu’elles fassent l’objet de reconstitutions au cinéma (La bande à Baader, Uli Edel, 2008), qu’elles servent de vecteurs d’authentification dans des docudrames (Jeux mortel, Heinrich Breloer, 1997), ou qu’elles subissent moult recyclages dans la sphère de l’art contemporain (Meinhof, Johannes Kahrs, 2001 ; Die Toten, Hans-Peter Feldmann, 1998), ces quelques représentations récurrentes semblent résumer et figurer à elles seules l’ensemble des événements qui ont fait la crise terroriste allemande dans les années septante. Conformément à un processus autonome de « métonymisation » des représentations, ces images d’archives renvoient ainsi à une multitude d’événements qui n’entretiennent parfois qu’un rapport très ténu avec les représentations proprement dites. Or, la plupart des recherches qui s’attachent à cet élargissement sémantique considèrent que ce détachement des images de leur référent originel et spécifique est avant tout tributaire du vieillissement des représentations.
A rebours de cette conception de l’image d’archives comme produit d’une réduction du réel à quelques représentations, nous ambitionnons de retourner à la genèse de ces objets visuels devenus emblèmes des années de plomb pour démontrer qu’au moment même de leur conception, de leur réalisation et de leur première diffusion, ces photos et photogrammes posent déjà les bases pragmatiques nécessaires à leur accession au statut de représentations emblématiques, et ce, bien avant leur vieillissement.