Impact d'une exposition aiguë au cadmium sur les neuromastes du système latéral troncal et conséquences sur le comportement de fuite "C-Start" du bar (Dicentrarchus labrax L., Téléostéen, Moronidae)

Les réponses comportementales du bar, Dicentrarchus labrax, ont été examinées après exposition aux ions cadmium en conditions contrôlées de laboratoire. Le but de cette étude était de découvrir si les ions cadmium étaient capables d’inactiver les neuromastes du système latéral du poisson et de déterminer les conséquences comportementales d’un tel blocage sensoriel chez des poissons soumis à des dangers artificiels. Pour cela, le comportement de fuite des poissons en réponse à un jet d’eau artificiel a été enregistré grâce à une caméra vidéo analogique (25 images.s-1) avant et après l’exposition au cadmium. Le protocole expérimental a été testé sur des poissons dont le système latéral avait été artificiellement endommagé par des antibiotiques (gentamicine et streptomycine). Les contrôles histologiques réalisés en microscopie électronique à balayage ont montré que le traitement antibiotique avait détruit les neuromastes du système latéral. En parallèle, ces poissons ne répondaient plus aux stimulations engendrées par le jet d’eau après un tel traitement. Le comportement de fuite des poissons a ensuite été enregistré avant puis après une exposition au cadmium à deux concentrations différentes. Lorsque les bars ont été exposés à la première concentration testée (0.5 µg.l-1, ce qui représente la concentration maximale rencontrée dans des estuaires contaminés), aucune altération des tissus des neuromastes n’a été observée. De plus, avant l’exposition au cadmium, les poissons répondaient de manière positive à 98.41 ± 4.95 % (n = 42) des stimulations de leur système latéral (réponse de fuite face au jet d’eau). Après l’exposition au cadmium, aucune modification comportementale n’a été détectée : les poissons répondaient positivement à 95.16 ± 9.79 % (n = 41) des stimulations ( ² = 2.464, p = 0.116). Au contraire, la concentration la plus élevée de cadmium testée (5 µg.l-1, ce qui représente 10 fois la concentration rencontrée dans les estuaires fortement pollués) a entraîné de sévères dommages au niveau des tissus des neuromastes. Juste après une telle exposition au cadmium, les poissons présentaient seulement 41.67 ± 35.36 % (n = 2) de réponses positives aux stimulations de leur système latéral, alors qu’ils répondaient positivement à 95.93 ± 9.10 % (n = 41) des stimulations en conditions témoins ( ² = 24.562, p < 0.0001). Les neuromastes de leur système latéral ont semblé se régénérer au bout d’environ un mois après l’exposition au cadmium. Associée à cette régénération, à partir du 21ème jour suivant l’exposition au cadmium, leur comportement de fuite s’est restauré et n’était plus significativement différent de celui enregistré en conditions témoins (86.74 ± 20.82 %, n = 11, ² = 2.876, p = 0.090). Cette étude montre que si la concentration de cadmium de 5 µg.l-1 est capable d’endommager les neuromastes du système latéral et de provoquer des altérations comportementales chez les poissons, les bars exposés à 0.5 µg.l-1 de cadmium ne présentent ni dommage tissualaire de leurs neuromastes, ni modification comportementale.