Abstract :
[fr] Ce travail part d'un constat. Celui que provoque l’usage routinisé de notions comme « emprise », « schéma cognitif » ou même « sortie », dès lors qu’il s’agit de rendre compte des parcours de femmes confrontées à des violences conjugales. Si l’intention de comprendre reste centrale, encore faut-il se demander ce qu’on comprend, depuis où, et à quelles conditions. L’enquête s’appuie sur une méthodologie inductive (Grounded Theory) et croise des matériaux discursifs (entretiens) avec des outils issus des approches cognitives (YSQ-S1), mais elle vise surtout à saisir ce que les femmes disent avoir pensé, contourné, évité ou (re)nommé à travers l’expérience de la violence. Ce n’est pas tant la « sortie » qui est ici mesurée, que les formes de lucidité, de résistance ou de protection que certaines ont pu construire — parfois longtemps avant qu’un seuil de rupture n’apparaisse. En refusant une lecture linéaire ou psychologisante, ce travail invite à penser les micro-décalages, les stratégies minuscules à partir desquelles se construit, petit à petit, une relecture de soi. Ce faisant, il interroge aussi le regard évaluatif que les institutions portent sur ces trajectoires, et les conditions mêmes qui rendent ces récits possibles.