La marche comme vecteur de transition urbaine. Le cas de la ville de Bejaia (Algérie)

La dégradation environnementale et le réchauffement climatique représentent des menaces très graves aujourd'hui et pour les générations futures. L'urbanisation accélérée, associée à l'augmentation des activités humaines intensives, provoque des émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. Selon les Nations Unies, la proportion de la population vivant en ville a atteint 56,9 % en 2022 et ce chiffre est prévu d'augmenter dans les prochaines décennies. Parmi les problèmes majeurs, les spécialistes évoquent principalement l'augmentation de l'usage des transports motorisés, suivant une politique de tout-à-la-voiture. Ces derniers représentent une source très importante de pollution atmosphérique, l'artificialisation des sols et la consommation excessive de l'espace au profit de la voiture particulière, provoquant des conséquences dévastatrices à l'échelle locale et globale. D’un autre côté, des études ont également démontré que l'inactivité des gens, due à la dépendance à la voiture particulière, a significativement augmenté, causant plusieurs maladies, notamment l'obésité. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), près de 1,8 milliard d'adultes dans le monde risquent de développer des maladies en raison de l’inactivité physique. Cette tendance à l'inactivité a augmenté d'environ 5 à 7 points de pourcentage, ce qui signifie que ce taux pourrait atteindre 35 % d'ici 2030. Dans ce contexte, les communautés urbaines s'intéressent de plus en plus à la question des déplacements actifs et durables, et la marche en ville prend une importance capitale.
Notre présente recherche, réalisée dans deux parties contrastées de la ville de Béjaïa en Algérie (la vieille ville et la ville basse) cherche à explorer l’influence des caractéristiques du paysage urbain sur la pratique de la marche en ville et se focalise principalement sur l'aspect perceptif, sensible et affectif des gens. Une méthodologie mixte a été utilisée, combinant des méthodes qualitatives et des mesures sur le terrain. Tout d'abord, des espaces urbains représentatifs dans la médina et la ville basse de Béjaïa ont été sélectionnés, incluant des itinéraires piétons, des escaliers urbains, des places publiques et des parcs. Une série de mesures sur le terrain a été effectuée pour recueillir des données concernant les caractéristiques thermiques, sonores, lumineuses et olfactives, qui ont été analysées et représentées graphiquement. Parallèlement, des promenades accompagnées ont été effectuées avec la population en parcourant les différents endroits sélectionnés, utilisant la technique du journal de marche pour recueillir les avis et les perceptions des différents participants.
Les résultats de cette recherche montrent que toutes les caractéristiques du paysage urbain, qu'elles soient sensorielles, naturelles, culturelles ou identitaires, ont un impact significatif sur la perception des piétons. D'autre part, il est démontré que les méthodologies qualitatives, telles que le journal de marche, apportent une contribution significative à ce type de recherches, et que les mesures quantitatives ne suffisent pas à elles seules pour comprendre la perception des marcheurs.
Cette communication souligne l’importance d’une approche intégrée et croisée entre développement territorial, transition et adaptation dans la gestion des espaces urbains. À travers le cas de Béjaïa, elle propose des pistes de réflexion pour encourager la marche dans les villes algériennes, dans un contexte de transition vers une mobilité plus durable et inclusive.