Au cœur de l'utilisation : perception des professionnels quant à l'utilisation du S/SAY au Québec et en Belgique

Plusieurs pays recourent à des outils d’évaluation du risque de récidive afin de le prédire plus précisément et intervenir de manière appropriée (Bonta & al., 2008; Koehler & al., 2013; Miller & Maloney, 2013). En Belgique francophone, le Strengths/Structured Assessment for Youth (S/SAY), instrument d’évaluation structuré, intègre les forces et les facteurs de risque dans l’évaluation des mineurs en conflit avec la loi.
Il est reconnu que la manière dont le personnel psychosocial comprend et met en œuvre les pratiques basées sur des données probantes peut avoir des implications importantes sur la récidive (Viglione, 2019). Au-delà de l’évaluation des qualités psychométriques, des recherches récentes sur la mise en œuvre d’instruments d’évaluation des besoins criminogènes ont révélé que les agents de probation se réapproprient les lignes directrices des pratiques enseignées (Flores & al., 2004; Viglione, 2019; Viglione & al., 2018). S’intéresser aux perceptions qu’ont les utilisateurs lorsqu’un nouvel outil d’évaluation est mis en œuvre semble donc essentiel (cf. la validité sociale; Schwartz & Baer, 1991).
Trente-quatre entretiens semi-structurés avec des travailleurs sociaux belges (70,96% de femmes et 29,04% d’hommes, âge moyen 36,74 ans), qui utilisent S/SAY dans trois Services d’Évaluation et d’Orientation (SEVOR) et dont 70% sont expérimentés dans l’aide à la jeunesse, seront présentés. Une analyse thématique selon les principes de Braun et Clarke (2006, 2021) a été réalisée.
Depuis l’inclusion formelle des forces, même s’ils peuvent parfois recourir à une évaluation informelle du risque (Viglione, 2019), ils reconnaissent l’utilité de l’évaluation structurée, en plus de leur jugement clinique, pour gagner en objectivité. En outre, ils ont souligné la pertinence de l’évaluation formelle des forces en tant que compétences concrètes des jeunes, pouvant prendre la forme d’un moteur de changement. Ces résultats encouragent l’inclusion des forces des jeunes dans l’évaluation actuarielle. Les défis que posent l’implantation de nouvelles pratiques de terrain en matière de fidélité et d’intégrité du programme mais aussi de changement de culture du milieu de terrain pourront seront discutées.