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Abstract :
[fr] La violence dans les relations amoureuses des adolescents et adultes émergeants est un objet d’étude suscitant un intérêt scientifique caractérisé par de multiples facettes. Les chercheurs ont ainsi investigué le champ des émotions, des cognitions, de l’attachement, des compétences relationnelles, ou encore des comportements problématiques, pour investiguer les variables susceptibles de contribuer à une meilleure compréhension du phénomène. Ces recherches invitent à concevoir la violence dans les relations amoureuses dans sa multidimensionnalité. Par le présent travail, nous avons souhaité nous inscrire dans cette perspective, ce qui nous a ainsi permis de traiter différentes thématiques.Dans un premier temps, nous nous sommes intéressés aux formes de violences agies et subies dans les relations amoureuses – menaces, violences relationnelles, physiques, sexuelles, émotionnelles et violences via les nouvelles technologies – et à leur taux de prévalence. Les chiffres présentés dans nos deux premières études montrent que la violence dans les relations amoureuses est une problématique vécue par de nombreux jeunes. La question de la « gender symmetry » demeure d’actualité en ce que les filles et les garçons sont tantôt auteur(e)s, tantôt victimes de ces violences. Cependant, nous tenons à rappeler que l’expression de « gender symmetry » fait référence aux faits de violence, et non pas aux impacts des violences. Par ailleurs, l’étude de ces différentes formes de violences a permis de relever trois dynamiques (i.e. multiperpétration, multivictimisation et bidirectionnalité). La multiperpétration et la multivictimisation indiquent des faisceaux de violence tantôt dans l’agir, tantôt dans le subir : un fait de violence agie ou subie s’accompagnera généralement d’autres faits de violence agie ou subie. De telles combinaisons de violence s’observent au sein des violences « off-line », au sein des violences via les nouvelles technologies, et entre ces deux modalités de violences. La bidirectionnalité, quant à elle, nous indique une interchangeabilité des statuts d’auteur(e) et de victime : il importe donc de ne pas polariser les partenaires intimes entre les auteur(e)s d’une part et les victimes d’autre part. Considérant ces différentes formes de violences agies et subies (menaces, violences relationnelles, physiques, sexuelles, émotionnelles et violences via les nouvelles technologies), elles sont très régulièrement associées aux attitudes relatives aux violences dans les relations amoureuses. Ce lien attitude-comportement est aujourd’hui encore un argument pour aborder ces attitudes lors de programmes de prévention auprès des jeunes. Nos analyses ont aussi permis de souligner que les attitudes en matière de violences dans les relations amoureuses sont tout particulièrement genrées. Les garçons tolèrent davantage les violences dans les relations amoureuses que ne le font les filles ; et les participants (filles comme garçons) tolèrent davantage les violences physiques et sexuelles d’une fille sur son petit ami que celles d’un garçon sur sa petite amie. Nous pensons important que notre société prenne conscience de la construction genrée des attitudes relatives aux violences dans les relations amoureuses. Enfin, nous avons observé que les participants plus jeunes présentaient des attitudes plus tolérantes à l’égard des violences dans les relations amoureuses que les participants plus âgés : cela peut encourager la mise en place de programme de prévention précoce.Puis, nous avons envisagé l’empathie, l’impulsivité et les aptitudes verbales comme potentiels corrélats des violences physiques et psychologiques agies dans les relations amoureuses d’une part, et comme potentiels corrélats des résolutions positives de conflit dans les relations amoureuses d’autre part. En matière de violence, nos hypothèses ont été partiellement corroborées en ce que certaines dimensions de l’empathie et des aptitudes verbales sont négativement associées à la perpétration ; et en ce que certaines dimensions de l’impulsivité y sont positivement associées. En matière de résolution positive de conflit, nos hypothèses ont également été partiellement corroborées en ce que certaines dimensions de l’empathie et des aptitudes verbales sont positivement associée à cette résolution positive ; et en ce que certaines dimensions de l’impulsivité y sont négativement associées. Considérant les différentes dimensions au sein des corrélats investigués, nous observons que les dimensions à teneur émotionnelle (ex : urgence négative, urgence positive) sont préférentiellement des corrélats de la perpétration de violence, alors que les dimensions à teneur cognitive (ex : prise de perspective) sont préférentiellement (pour les filles) des corrélats de la résolution positive de conflit. L’étude exploratoire de ces variables invite à prendre davantage en considération les facteurs individuels/personnels dans les recherches, ainsi que dans les interventions lors desquelles davantage d’activités de skill-building pourraient être organisées à destination des adolescents et adultes émergeants. Par ailleurs, eu égard à notre intérêt pour la linguistique cognitive, nous espérons que les aptitudes verbales deviendront une variable d’intérêt pour la compréhension des comportements, notamment violents : il nous semblerait maladroit d’ab-straire l’Homme du langage dans lequel le rapport à l’Autre le plonge nécessairement.En matière de substances, nos résultats soulignent une association entre le fait de consommer de l’alcool dans les deux heures qui précèdent une insulte agie ou subie et le fait de consommer de l’alcool dans les deux heures qui suivent une insulte agie ou subie. Par nos analyses, nous avons vu qu’une plus grande consommation problématique d’alcool indique une augmentation du risque de rapporter des insultes dans un contexte de consommation (alcool dans les deux heures qui précèdent ou suivent l’insulte) par rapport au fait de rapporter des insultes sans contexte de consommation ; de même que par rapport au fait de ne pas rapporter d’insultes. De la sorte, nous pensons que la question de la temporalité entre consommation et violence dans les relations amoureuses doit demeurer un point d’intérêt dans les études et démarches préventives dédiées aux comportements à risque (en l’occurrence, des adultes émergeants). Bien entendu, nos études connaissent des limites qui appellent donc de nouvelles recherches afin d’affiner notre compréhension de la violence dans les relations amoureuses. La complexité de ce phénomène encourage à élaborer de nouvelles stratégies en matière d’échantillonnage, d’outils de mesure, de design expérimental, ou encore de procédures analytiques. De nombreuses questions méritent encore d’être posées.Enfin, considérant ces cinq études, nous avons souhaité terminer ce travail par un chapitre dédié aux interventions en matière de violences dans les relations amoureuses. Eu égard à la dimension sociétale de ce phénomène, il eût été dommage d’en faire un objet d’étude confisqué par la science. Dès lors, nous avons tenu à saisir l’opportunité de montrer comment la recherche peut contribuer à des implications cliniques. Nous avons ainsi souligné qu’il était important d’envisager la prévention à partir de différentes facettes – telles que les connaissances, les attitudes, les compétences et les comportements à risque – afin de rencontrer au plus près la multidimensionnalité de la violence dans les relations amoureuses des adolescents et adultes émergeants.
