Abstract :
[fr] L’aromatase est un enzyme-clé qui catalyse la conversion de la testostérone en œstradiol. Cette conversion constitue une étape limitante dans le contrôle du comportement sexuel mâle. Bien qu’encore partiellement incompris aujourd’hui, différents mécanismes de contrôle de l’activité aromatasique ont été mis en évidence par de récentes études. D’une part, l'activité aromatasique du cerveau peut être modifiée par une action lente, génomique et synergique des androgènes et des œstrogènes agissant via leurs récepteurs intracellulaires spécifiques. Ce mécanisme relativement lent implique que la variation de la biodisponibilité en œstrogènes et, en dernière analyse, le comportement sexuel soient corrélés à des variations à long terme des taux plasmatiques de stéroïdes telles que les variations saisonnières ou développementales. Cet effet génomique des œstrogènes sur le comportement sexuel est aujourd’hui communément accepté: l’expression du comportement sexuel consommatoire mâle ainsi qu’un des indices du comportement sexuel appétitif mâle (réponse apprise de proximité sociale) chez la caille sont strictement dépendants de l’aromatisation de la testostérone en œstradiol. D’autre part, la production d'œstrogènes dans le cerveau peut être modifiée de façon rapide, non-génomique, par des processus qui impliquent des phosphorylations sous l'action de certains neurotransmetteurs tels que le glutamate et la dopamine. L’existence d’une telle régulation rapide de l’activité aromatasique, et donc de la production subséquente d’oestrogènes, est en adéquation avec les effets rapides des œstrogènes dans le cerveau rapportés par de nombreuses études au cours des 20 dernières années. Cette thèse a donc été consacrée à la caractérisation des effets génomiques et non-génomiques des œstrogènes dans le contrôle du comportement sexuel mâle et à l’identification des substrats neuroanatomiques qui sous-tendent ces deux types d’effets dans le contrôle du comportement reproducteur. Dans ce cadre, notre travail s’est articulé en trois parties distinctes mais fonctionnellement liées. Dans une première partie, nous avons d’abord exploré plus avant le contrôle hormonal d’un indice de la motivation sexuelle : les contractions rythmiques des muscles cloacaux (RCSM) en réponse à la vue d’une femelle. Nous avons donc montré que l’expression des RCSM dépend de l’aromatisation de la testostérone en œstradiol. Par la suite, nous avons démontré que les composantes appétitives et consommatoires du comportement sexuel mâle étaient contrôlées par des réseaux neuronaux en partie distincts mais incluant de façon proéminente l’aire préoptique médiane, et plus spécifiquement le noyau préoptique médian. La deuxième partie de cette thèse a été consacrée à l’analyse plus approfondie du contrôle hormonal d’une réponse sexuelle conditionnée - les contractions rythmiques des sphincters cloacaux conditionnées (RCSM conditionnées) et des sites nerveux responsables de l’activation de cette réponse. Nous démontrons que les RCSM conditionnées dépendent également de l’aromatisation de la testostérone en œstrogènes, comme cela est le cas pour leur versant inné. Par la suite, nous avons montré que l’exposition à un stimulus sexuel conditionné avant la copulation provoque une activité neuronale accrue dans des régions cérébrales jouant un rôle-clé dans le contrôle du comportement sexuel, l’aire préoptique médiane et la partie médiane noyau du lit de la strie terminale (BSTM). Finalement, dans une troisième partie, nous nous sommes attachés à l’étude de la modulation rapide du comportement sexuel mâle par les œstrogènes. Dans ce cadre, nous avons montré que la régulation positive et négative des concentrations cérébrales en œstrogènes affectent rapidement l’expression du comportement sexuel mâle chez une espèce aviaire (caille) et une espèce murine (souris). Ce dernier modèle nous a de plus permis de valider la spécificité neuroendocrinienne des effets comportementaux rapides observés.