Abstract :
[fr] L’administration de spermine aux rats non sevrés, dans des conditions expérimentales précises, constitue un modèle d’étude de la maturation postnatale de l’intestin grêle. L’analyse des variations survenant au sein du protéome cellulaire, trois jours après l’ingestion de spermine, met en évidence des protéines impliquées dans le processus de maturation de l’intestin grêle. La même étude, réalisée quelques heures après l’ingestion, précise la phase de desquamation cellulaire initialement observée. Les analyses effectuées révèlent que, six heures après le traitement des ratons à la spermine, la phase de desquamation touche à sa fin et l’épithélium se régénère tandis que, dix-huit heures après ce traitement, les résultats indiquent un début de maturation des entérocytes, signalé, notamment, par l’apparition, dans l’iléon, d’une isoforme de la phosphatase alcaline, qui est spécifique de l’épithélium intestinal mature. Des protéines impliquées dans la conformation de la chromatine et, par là, dans la régulation de l’expression de gènes spécifiques, sont identifiées six heures après l’ingestion de la polyamine.Devant la diversité des protéines identifiées trois jours après le traitement des animaux, nous nous sommes plus particulièrement intéressée à des modifications survenant au niveau de la cathepsine D et des enzymes du cycle de l’urée. Des propriétés des enzymes de ce cycle sont effectivement modifiées lors de la maturation postnatale spontanée de l’intestin grêle. Lors de l’ingestion de spermine, on observe des modifications au niveau de la transcription de gènes codant pour certaines de ces enzymes. Dans le cas de la cathepsine D, l’expression du gène codant pour l’enzyme et l’activité de celle-ci sont diminuées dans les entérocytes de l’iléon suite à l’ingestion de spermine. L’action de cette polyamine a été reproduite, in vitro, à partir d’une culture de cellules de tumeurs mammaires surexprimant le gène de la cathepsine D. Par ailleurs, nos résultats montrent que, dans certains cas, la spermine n’agit pas au niveau de l’expression génique mais que des modifications post-traductionnelles des protéines sont à l’origine des variations d’activités enzymatiques observées, comme c’est le cas de la phosphatase alcaline intestinale.Les protéines identifiées par l’analyse protéomique, et l’étude théorique de leur régulation, révèlent que plusieurs voies de signalisation intracellulaire sont affectées par l’ingestion de spermine : cette polyamine active la voie de signalisation faisant intervenir la PLC ainsi que celle dépendant des glucocorticoïdes. A l’inverse, la signalisation intracellulaire impliquant la PKA est inhibée.En conclusion, notre approche globale, considérant les protéines dont des propriétés varient de manière majeure dans les entérocytes de rats immatures soumis à l’action de la spermine, ouvre plusieurs pistes pour des recherches futures ciblées. La poursuite des investigations, limitées cette fois à considérer une voie métabolique particulière ou des protéines spécifiques, conduira à une compréhension plus complète des modifications survenant dans les entérocytes du rat au moment du sevrage.