Contribution à l'étude de l'effet de la sympathectomie sur la microcirculation cutanée : Approches expérimentale et clinique

Introduction.La microcirculation se définit comme le compartiment vasculaire où s’effectuent les échanges entre le sang et les cellules. Elle joue donc un rôle primordial dans la physiologie des organes. Le système microcirculatoire cutané est impliqué dans la régulation de la température corporelle et des apports nutritifs de la peau, élément particulièrement important dans les processus de cicatrisation et de lutte contre l’infection. Le contrôle de la microcirculation dépend d’un ensemble de systèmes intrinsèques et extrinsèques. Le système sympathique y représente l’élément majeur, de par son effet vasoconstricteur, mais également de par son implication dans la régulation des autres systèmes. La sympathectomie, qu’elle soit chirurgicale ou pharmacologique via l’utilisation d’anesthésiques locaux, entraîne une vasodilatation, potentiellement favorable pour la microcirculation cutanée. Toutefois, le recours aux drogues vasoconstrictrices est fréquent au cours de la période périopératoire pour corriger une hypotension secondaire à la chirurgie, à l’anesthésie générale ou à l’anesthésie loco-régionale. L’interaction de ces drogues et de la sympathectomie est mal connue. C’est pourquoi nous avons étudié dans ce travail, au travers de deux modèles, les conséquences des drogues vasoconstrictrices couramment utilisées dans nos pays sur la vasodilatation induite par une sympathectomie.Etude des effets de médiateurs adrénergiques sur la microcirculation cutanée d'un lambeau épigastrique chez le rat : Conséquences d'une adventicectomie périvasculaire récente.La sympathectomie chirurgicale par adventicectomie circonférentielle des vaisseaux nourriciers d’un lambeau épigastrique cutané chez le rat représente le premier modèle étudié. Deux lambeaux épigastriques sont levés chez le rat. Les vaisseaux nourriciers du premier lambeau font l’objet d’une adventicectomie chirurgicale. Le lambeau controlatéral sert de témoin. L’utilisation de phényléphrine et de norépinéphrine systémique, est responsable d’une élévation de la pression artérielle. Elle est associée à une majoration de la microcirculation cutanée évaluée par la technique de fluxmétrie par Laser-Doppler du côté du lambeau où les vaisseaux ont subi une sympathectomie. De ce côté, à la différence du côté témoin, on n’observe pas de diminution secondaire de la microcirculation cutanée. Si l’on traite au préalable les rats avec une substance alpha1 antagoniste (Prazosin), l’injection de norépinéphrine produit des deux côtés une majoration de la microcirculation non suivie de la diminution secondaire retrouvée précédemment du côté témoin lors de l’injection unique d’agonistes alpha-adrénergiques. Effet de l’injection intraveineuse de norépinéphrine et d’éphédrine sur la microcirculation cutanée évaluée par fluxmétrie Laser-Doppler au cours d’une anesthésie rachidienne.La rachianesthésie représente le deuxième modèle de sympathectomie. La microcirculation cutanée, étudiée par la technique de fluxmétrie par laser-Doppler est évaluée au niveau du pied, zone affectée par un bloc sympathique et au niveau du manubrium sternal, zone a priori non concernée par le bloc sympathique. L’hypotension secondaire à la rachianesthésie est corrigée par une perfusion continue de norépinéphrine ou un bolus d’éphédrine. La rachianesthésie est associée à une majoration de la microcirculation cutanée au niveau du pied, et une diminution au niveau sternal. La correction de l’hypotension par les drogues vasoconstrictrices n’abolit pas la majoration observée au niveau du pied. Au niveau du sternum, on n’observe pas de changements microcirculatoires significatifs.Conclusions.Sous réserve des limites des différents modèles étudiés, il apparait que la sympathectomie, qu’elle soit chirurgicale ou pharmacologique, protège la microcirculation des effets vasoconstricteurs des drogues analeptiques. Plusieurs hypothèses physiologiques sont proposées. Elles font référence à l’interdépendance entre les différents systèmes régulateurs microcirculatoires. Les informations tirées de nos travaux permettent donc d’affiner la prise en charge anesthésique des patients relevant de la microchirurgie et bénéficiant d’une chirurgie ou d’une technique d’anesthésie induisant une symphatectomie. Par ailleurs, la démonstration d’une majoration de la microcirculation cutanée maintenue même lors de l’administration de faibles doses de vasoconstricteurs au cours des anesthésies rachidiennes devrait motiver les anesthésistes à proposer davantage cette technique anesthésique ou d’autres techniques loco-régionales, telles le bloc nerveux périphérique et la péridurale, pour profiter des bénéfices potentiels de ces effets microcirculatoires.