Abstract :
[fr] Ce travail a été mené dans l’objectif d’évaluer les propriétés antiplasmodiales de plantes médicinales du Burkina Faso à travers une démarche ethnopharmacologique, en vue d’isoler de nouveaux composés à potentialités antipaludiques et d’envisager la valorisation locale des plantes actives.Une première étape d’enquêtes ethnobotaniques nous a permis de répertorier les espèces végétales utilisées dans le traitement traditionnel du paludisme et des fièvres au Burkina Faso. Parmi les 72 espèces recensées, nous en avons sélectionné treize pour l’étude de leur activité antiplasmodiale en laboratoire. Des extraits préparés à l’aide de différents solvants (dichlorométhane, méthanol, eau), à partir des échantillons végétaux récoltés, ont ensuite été testés in vitro sur Plasmodium falciparum en utilisant une méthode colorimétrique (pLDH assay). Ce screening antiplasmodial a mis en évidence une activité significative pour 8 espèces (IC50 < 50µg/ml), dont 3 ont montré une bonne activité (IC50 < 15µg/ml), ce qui témoigne de la présence de constituants antiplasmodiaux dans ces végétaux, validant dès lors leur usage traditionnel. Ce travail constitue le premier rapport de l’activité antiplasmodiale de 5 de ces plantes. Dicoma tomentosa et Gardenia sokotensis ont été sélectionnées pour un fractionnement bioguidé afin d’en isoler les composés responsables de leur activité. Des tests complémentaires de toxicité (hémolyse, cytotoxicité sur fibroblastes et génotoxicité) ont également été réalisés afin d’évaluer la sécurité d’usage de ces plantes qui paraissent prometteuses étant donné leur activité sur le parasite.L’étude de Dicoma tomentosa Cass. a mené à l’isolement de son principe actif majoritaire (PA), une lactone sesquiterpénique de type mélampolide : l’urospermal-A-15-O-acetate (UA15OA). Ce composé a montré une activité particulièrement prometteuse sur P. falciparum (IC50 <1µg/ml). Les extraits et l’UA15OA n’ont cependant montré qu’une sélectivité modérée lors des tests de cytotoxicité (IS ~ 3, pour les extraits et l’UA15OA). Les tests de génotoxicité (numération des micronoyaux) ont également décelé une activité significative, aussi bien pour le PA que pour les extraits. Ces résultats laissent suspecter une toxicité (chronique) et doivent inciter à la prudence quant à l’utilisation traditionnelle de cette plante, malgré son potentiel antiplasmodial réel. Par ailleurs, l’UA15OA ayant montré des propriétés cytotoxiques sur diverses lignées de cellules cancéreuses (dont certaines résistantes à l’apoptose), l’étude de ses potentialités antitumorales pourrait constituer une perspective complémentaire dans le cadre de nos travaux sur D. tomentosa.L’étude de Gardenia sokotensis Hutch. a révélé que l’activité antiplasmodiale de l’extrait au dichorométhane de la plante n’est pas attribuable à un principe actif majoritaire mais résulte d’une complémentarité d’action entre différents composés. Quatre terpènes ont été isolés, dont un identifié comme un nouveau triterpène de type 3,4,seco-cycloartane : la sokotensine A. Les produits purifiés ont tous montré une activité proche de celle de l’extrait de départ sur P. falciparum (IC50 ~ 12µg/ml) et pas (ou peu) de sélectivité vis-à-vis du parasite lors des tests de cytotoxicité. Des études complémentaires, concernant la toxicité potentielle de G. sokotensis, ainsi que son efficacité clinique seraient nécessaires afin de statuer sur son intérêt en médecine traditionnelle pour le traitement du paludisme. /The aim of this work was to evaluate the antiplasmodial properties of medicinal plants from Burkina Faso through an ethnopharmacological approach, in view to isolate new antiplasmodial compounds and to consider the local valorization of active plants.Ethnobotanical field studies allowed us to list 72 vegetal species used in traditional medicine in Burkina Faso to treat malaria. Thirteen plants were selected for laboratory investigations of their antiplasmodial activity.Plant extracts were prepared using different solvents (dichloromethane, methanol, water) and tested in vitro against Plasmodium falciparum, using the pLDH assay. This screening highlighted the significant antiplasmodial activity of 8 species (IC50 < 50µg/ml) and 3 of them displayed a good activity (IC50 < 15µg/ml). This confirms the presence of antiplasmodial compounds in these plants and thereby validates their traditional use. This work is the first report of antiplasmodial properties for five of them. We selected Dicoma tomentosa and <em>Gardenia sokotensis</em> for a bioguided fractionation in order to isolate their active constituents. Complementary toxicity tests were performed to evaluate the safety of use of these plants, which seem promising regarding their activity against the parasite.The study of Dicoma tomentosa Cass. led to the isolation of its major active compound, a melampolide-type sesquiterpene lactone, urospermal A-15-O-acetate (UA15OA). This compound showed very promising activity against P. falciparum (IC50 < 1µg/ml). However the antiplasmodial extracts, as well as UA15OA, displayed only a moderate selectivity in cytotoxicity assay (IS ~ 3). A genotoxic activity was also detected (micronucleus assay) for extracts and the pure compound. These findings point towards potential toxicity in chronic use for humans and therefore underline the need for caution regarding to the traditional use of this plant, despite its real antiplasmodial potential. On the other hand, the cytotoxic activity detected with UA15OA towards different cancer cell lines encourages us to further investigate its antitumoral potential, which represents an additional outcome from our studies about D. tomentosa.The study of Gardenia sokotensis Hutch. showed that the activity of the dichloromethane extract cannot be attributed to a major active compound, but results from the combined action of many compounds in the plant. Four terpenes were isolated and one of them was identified as a new 3,4-seco-cycloartane triterpene, named sokotensine A. All purified compounds displayed the same level of activity as the whole extract against P. falciparum (IC50 ~ 12µg/ml) and no (or low) selectivity in cytoxicity assays. The potential toxicity of G. sokotensis as well as its clinical efficacy should be further investigated to determine the relevance of its use in traditional medicine in malaria treatment.