Du théâtre à la polémique, de la polémique au théâtre. Regards croisés sur La Guisiade de Pierre Matthieu et les libelles de la Ligue parisienne

Dans cette communication, je souhaite me fonder sur ma connaissance des libelles imprimés par la Ligue parisienne, auxquels j’ai dédié plusieurs travaux, pour proposer une relecture de La Guisiade de Pierre Matthieu. Mon objectif est d’identifier des points de rencontre entre cette tragédie et une sélection de textes polémiques publiés à l’occasion des assassinats de Blois (La double tragedie du duc et cardinal de Guyse, Le martire des deux freres, La vie et innocence des deux freres, Les regrets de Madame de Nemours sur la mort de Messeigneurs de Guyse, ses enfans, Histoire au vray du meurtre & assassinat proditoirement commis au cabinet d’un Roy perfide & barbare, Pleurs et soupirs lamentables de madame de Guyse, Reponse faicte à la declaration de Henry de Valois) puis du régicide d’Henri III (Discours veritable de l’estrange et subite mort de Henry de Valois, Admirable et prodigieuse mort de Henry de Valoys, Le discours au vray sur la mort et trespas de Henry de Valois, Le martyre de frere Jacques Clement, Le tyrannicide ou mort du tyran, La vie et la mort de Henry de Valois).
En m’appuyant sur la riche bibliographie consacrée à La Guisiade et sur les Recherches sur l’imprimerie à Paris pendant la Ligue de Denis Pallier, j’établirai une datation précise de la composition de ces textes afin d’émettre des hypothèses sur leurs influences mutuelles. Pour mettre au jour la réception de la tragédie dans les écrits polémiques mais aussi les éventuels apports des libelles à l’œuvre de Pierre Matthieu, je me concentrerai particulièrement, dans les imprimés ligueurs, sur la retranscription de paroles en discours direct, les dialogues entre différents intervenants, l’identification des protagonistes principaux à diverses passions, les narrations spectaculaires des meurtres ou le rôle joué par des personnages secondaires. Afin d’établir les liens entre la tragédie et l’actualité politique ainsi que la dimension militante de l’écriture de Matthieu, je chercherai à identifier, dans La Guisiade, la présence d’une série d’éléments pragmatiques et politiques ayant contribué, dans les libelles, à légitimer le mouvement de résistance au tyran puis la justification du geste de Jacques Clément par la définition du tyran et la distinction entre régicide et tyrannicide : la diffamation d’Henri III en roi hypocrite, la démonstration de l’innocence du duc de Guise, la construction post mortem de son rôle symbolique dans le combat politique de la Ligue, l’opposition axiologique entre le catholique vertueux et le tyran.