Abstract :
[fr] Le phénomène est largement documenté dans le champ de la sociologie et bien connu des architectes : la mise en œuvre des politiques environnementales, en particulier énergétiques, dans le secteur de la construction favorise la technicisation des bâtiments. Parmi les multiples équipements qui peuplent nos bâtiments « performants », la ventilation mécanique contrôlée (VMC) en constitue un témoin privilégié. Plus largement, elle illustre la confiance accordée aux objets techniques pour résoudre les problématiques environnementales, non sans faire débat.
Considérant l’imposition de la VMC comme un non-sens écologique, des architectes déploient stratégies et tactiques pour élaborer des logements performants ventilés naturellement et en faire des manifestes, quitte à parfois se mettre hors la loi. Prenant appui sur la théorie de l’acteur-réseau, l’analyse des trajectoires de ces (tentatives de) productions, en France et en Belgique, montre que ces architectes font à la fois acte politique et œuvre d’innovation, ouvrant des voies alternatives aux logiques technico-centrées.
Effectivement, il ne s’agit pas de mettre en œuvre des méthodes de ventilation préexistantes mais de les adapter, de les réinventer pour répondre aux enjeux écologiques et d’habitabilité actuels, aboutissant à des dynamiques originales d’association et de dissociation entre entités humaines et non humaines. Il en ressort des alliances fécondes entre circulation de l’air, matériaux, spatialité, outils d’objectivation, mais aussi entre architectes, bureaux d’études, maîtres d’ouvrage voire centres de recherche et artisans.
Par leurs expériences, réalisations, contre-projets et publications relatant tantôt des succès, tantôt des échecs (car tous les combats n’aboutissent pas), ces architectes alimentent l’intérêt montant porté au low tech et les réflexions techno-écologiques concernant notre agir technique et nos rapports à la nature, dans le secteur de la construction et au-delà. Leurs cheminements nous offrent également des prises pour identifier certains verrouillages sociotechniques empêchant la basse technologie de sortir du statut de niche et de participer plus largement à la reformulation de ce que peut signifier l’écologie.