A la table du souverain. Modération, excès et hiérarchie dans les banquets de cour hellénistiques et impériaux

A travers une sélection de sources littéraires grecques et latines, datant de l’époque d’Alexandre jusqu’à la haute période impériale, on se propose de discuter quelques aspects de la thématique concernant l’existence (ou l’absence) de règles morales auxquelles la conduite des souverains devrait être sujette par rapport à la consommation de la nourriture et du vin.
Plutôt que de prendre en considération l’aspect médical de la diète royale, l’étude se focalise sur ses implications sociales et symboliques : notamment, le rôle de la consommation sociale de la nourriture dans la définition d’une royauté qui accepte d’obéir à des règles partagées de modération et d’autocontrôle, promues et protégés par les élites, ou qui, par contre, prétend de manifester sa dimension charismatique à travers une conduite se plaçant consciemment au-delà des limites imposées aux sujets.
Les textes analysés discutent le thème du rapport entre le souverain et la nourriture soit à travers les récits de banquets devenus célèbres dans la tradition historiographique et rhétorique, soit par le biais de scènes mythiques ou de banquets historiques imaginaires, où la fiction littéraire sert à thématiser le rapport entre le souverain et les élites ainsi que la mise en place d’une hiérarchie de cour.
Un aspect crucial de cette analyse concerne l’identification des classes sociales appelées, dans les textes, à définir les règles du rapport entre le roi et la nourriture, ainsi qu’à exercer le rôle de contrôleurs du respect de ces règles. Un autre aspect à considérer est l’appartenance sociale des auteurs des textes qui prescrivent, approuvent ou stigmatisent certaines pratiques. Considérées ensemble, ces deux perspectives nous permettront de discuter les intérêts et l’agenda des groupes qui s’expriment à travers ces textes.
Une attention particulière sera donnée à l’époque de transition entre la fin de la période hellénistique et le début du Principat, lorsque la réflexion sur la sobriété ou la tryphè (ou, selon une perspective critique, la débauche) du roi s’inscrit dans une discussion plus large sur le choix de continuité ou de rupture entre le modèle royal hellénistique et le type de pouvoir monarchique universel expérimenté par les premiers empereurs.