Abstract :
[fr] La recherche proposée s’intègre dans le cadre d'une collaboration entre l'Italie et la Belgique portant sur les questions de la conservation et de la protection du paysage, lies au thème de l'urbanisme. L’objectif de cette collaboration est de mettre en évidence les contributions d’échelles diverses qui, dans le contexte belge, ont contribué à l'émergence des directives internationales actuelles dans le domaine de la conservation et de la protection des centres historiques et du paysage.
Ces dernières années, le concept de paysage a fait l’objet d’une attention croissante de la part d'universitaires et d'experts appartenant à différentes disciplines. Au cours du XXe siècle, ce concept a connu une importante évolution au contact de ces disciplines ; en résulte ce que l’on nomme aujourd’hui le paysage urbain historique, qui est « le résultat d’une stratification historique de valeurs et caractères culturels et naturels qui vont au-delà de la notion de centre historique ou ensemble, jusqu'à inclure le contexte urbain le plus large et son emplacement (setting) géographique » (ajouter référence). Prenant en compte les perceptions et relations visuelles, les pratiques et valeurs sociales et culturelles, les processus économiques et les dimensions immatérielles du patrimoine liés à la diversité et l'identité des différentes cultures locales, l'approche du paysage urbain historique soutient les communautés dans leur quête de développement et d'adaptation, tout en conservant les caractéristiques et les valeurs liées à leur histoire, leur mémoire collective et leur environnement.
Dès l’entre-deux-guerres, plusieurs personnalités ont abordé le problème des sites à partir de domaines jusque là distincts au profit d’une vision globale, liant les instances historique et esthétique de la ville et donc, la protection et la restauration du patrimoine et celle du paysage.
Avec d’autres personnalités remarquables, tel Charles Buls, l’architecte-paysagiste Louis Van der Swaelmen a joué, dans le contexte belge, un rôle essentiel dans cette évolution de la culture de la conservation de la seule prise en compte des monuments à celle de la dimension urbaine.
Avant tout connu comme planificateur et architecte-paysagiste urbain dans le cadre du Mouvement Moderne – dont il a été l'un des promoteurs –, Louis Van der Swaelmen est l’auteur des premières cités-jardins belges dans le premier tiers du XXe siècle. A ce jour, il est considéré comme l'un des acteurs principaux de la reconstruction d'une Belgique en grande partie détruite par l'artillerie allemande. En effet, après une période d'exil aux Pays-Bas lors de la Première Guerre mondiale, il rassemble une abondante documentation qui servira de base théorique non seulement aux travaux de reconstruction, mais aussi au développement du nouveau. En revanche, il est peu connu pour sa mobilisation en faveur de la protection et de la conservation des sites. Pourtant, on peut affirmer que Louis Van der Swaelmen fait partie des architectes qui ont conduit au changement de l'image du paysage belge, à un moment significatif de l'histoire architecturale nationale et européenne.
L'objectif de cette étude a été non seulement d'examiner la figure de Louis Van Der Swaelmen en tant qu’architecte-paysagiste, personnalité émergente dans le contexte du développement urbain et précurseur du Mouvement Moderne belge, mais surtout de restituer sa culture architecturale et sa pensée dans le contexte national et international de la conservation, avec l’émergence de l’intérêt pour les sites et paysages. L’oeuvre de Van de Swaelmen se développe à une période particulière de l'histoire de la Belgique, où la construction d’une identité, notamment à travers la formation d’un esprit artistique national, est essentielle. Sur la scène internationale, les bases d'une conservation des sites, étroitement liés à l'évolution de la société dans son ensemble, ont été posées. Les contributions théoriques liées à la période complexe de la seconde moitié du XIXe siècle jusqu'aux années 1930 ont été essentielles, avec la conférence d'Athènes de 1931 et le Congrès du CIAM de 1933. Parmi celles-ci émergent les réflexions de Victor Hugo en France, de Goethe en Allemagne, de John Ruskin et du mouvement Arts and Crafts de William Morris en Grande-Bretagne, les études sur la culture historique de l'espace urbain de Camillo Sitte, la théorie du Kunstwollen de Alois Riegl ou encore les progrès dans le domaine de l'esthétique allemande de Gottfried Semper et les théories de Friedrich Theodor Vischer. Toutes ces expériences ont contribué, d'une façon plus ou moins visible, à l'évolution des mécanismes d’élaboration des directives internationales dans le domaine de la conservation et de la protection des centres historiques et du paysage.
On peut donc considérer que Louis Van der Swaelmen a été formé dans un contexte très stimulant, non seulement par les contributions européennes dans le domaine de la conservation, mais aussi par les influences importantes anglaises, françaises, allemandes et néerlandaises qui ont marqué, après la Première Guerre mondiale, le monde de la planification urbaine et de la conservation dans le contexte belge.
L’étude a été également l’occasion de comprendre et définir les points de contact entre les théories de conservation et celles de l'urbanisme, qui aujourd'hui, selon une vision simpliste de la réalité, sont considérées dans certains cas comme éloignées voire opposées. L'un des objectifs a été, par conséquent, contribuer à l'idée qu'au contraire, l’acte de la conservation et le projet du nouveau (soit en milieu urbain ou non), ne sont que des moments différents et complémentaires du même acte culturel.
