Abstract :
[fr] Objectif
L'objectif de notre recherche était d'évaluer la faisabilité et l'efficacité du traitement assisté par diacétylmorphine à Liège. Ce traitement est destiné aux personnes dépendant de l'héroïne qui continuent à consommer malgré les traitements existants.
Méthodes
Les données ont été récoltées dans le cadre du projet TADAM, un projet pilote de Traitement Assisté par Diacétylmorphine (ou DAM). Celui-ci s'est déroulé à Liège de 2007 à 2013. Le cœur du projet était constitué par une étude contrôlée randomisée destinée à comparer le traitement par diacétylmorphine – limité à 12 mois – avec les traitements par méthadone existants. Un participant était considéré comme répondeur s'il montrait une amélioration au niveau de la consommation d'héroïne de rue, de la santé ou de l'insertion dans un milieu délinquant. Cette étude a été complétée par une série de recherches (basées principalement sur des interviews) destinées à comprendre l'interaction entre l'étude elle-même et les acteurs impliqués, c'est-à-dire les consommateurs d'héroïne (inclus ou non inclus), les riverains du centre DAM, les intervenants dans le centre DAM ainsi que les intervenants d'autres institutions d'aide et de soins en contact avec notre public cible à Liège.
Résultats
Avec l'aide des centres d'aide et de soins partenaires de l'étude, 74 participants (au lieu des 200 prévus) ont été inclus et randomisés : 36 dans le groupe expérimental et 38 dans le groupe contrôle. Ces personnes étaient dépendantes de l'héroïne depuis 20 ans en moyenne et avaient essayé 9 traitements pour leur(s) assuétude(s). A la fin de l'étude, le nombre de répondeurs dans le groupe expérimental n'était pas significativement supérieur à celui dans le groupe contrôle (p=0,35). Cependant, les participants dans le groupe expérimental ont montré des améliorations significativement plus importantes que dans le groupe contrôle, au niveau de la consommation d'héroïne de rue (p=0,0011) et de la santé physique (p=0,043) ou mentale (p=0,035). Lors de l'étude de suivi, réalisée trois mois après les 12 mois de traitement, la consommation d'héroïne de rue du groupe expérimental avait significativement remonté (p=0,0052) et elle n'était plus significativement différente de celle du groupe contrôle (p=0,55).
Discussion
Les participants inclus dans l'étude étaient, comme prévus, des personnes sévèrement dépendantes de l'héroïne qui n'avaient pas trouvé de solution à leur assuétude avec les traitements existants. Dans le groupe expérimental, les participants ont nettement diminué leur consommation d'héroïne de rue mais, trois mois après l'arrêt du traitement par diacétylmorphine, leur consommation avait augmenté. A l'étranger, où les études ont montré l'efficacité supérieure de ce traitement par diacétylmorphine par rapport au traitement par méthadone pour le groupe cible, les améliorations apportées par le traitement expérimental se sont maintenues après les études contrôlées randomisées même en cas d'arrêt du traitement, mais pas si l'arrêt était forcé contre la volonté du patient. Néanmoins, notre recherche a montré la faisabilité du traitement par diacétylmorphine à Liège et son acceptation par les acteurs concernés.
Conclusion
Le traitement par diacétylmorphine est réalisable en Belgique. Les études à l'étranger ont montré qu'il était plus efficace que le traitement par méthadone et que les bénéfices apportés par cette prise en charge se maintiennent pendant des années. Mais ces bénéfices disparaissent en cas d'arrêt forcé du traitement contre la volonté du patient.
[en] Objective
The aim of our research was to assess the feasibility and efficacy of a treatment assisted by diacetylmorphine in Liège. This treatment is offered to persons dependent on heroin who pursue street heroin use despite existing treatments.
Methods
Data were collected in a pilot project of Treatment Assisted by Diacetylmorphine (TADAM), which took place in Liège from 2007 to 2013. The heart of this project is a randomised controlled trial comparing a diacetylmorphine treatment – limited to 12 months – with existing methadone treatments. A participant was responder if he/she showed improvement on the level of street heroin use, health or criminal involvement. Other researches (mainly based on interviews) were added in order to understand interactions between the trial and its actors: heroin users (included or not-included), neighbours of the DAM centre, the staff of the DAM centre and staff of other institutions who worked with our target group in Liège.
Results
With the help of the centres, partners of the trial, 74 participants (of the 200 planned) were included and randomised: 36 in the experimental group and 38 in the control group. These participants were dependent on heroin for 20 years on average and had already tried 9 treatments for their addiction(s). At the end of the trial, the number of responders in the experimental group was greater but not significantly than in the control group (p=0.35). However, participants in the experimental group showed greater improvement than in the control group, on the level of street heroin use (p=0.0011) and physical (p=0.043) or mental (p=0.035) health. During the follow-up study, three months after the end of the 12 months of treatment, street heroin use in the experimental group had significantly increased (p=0.0052) and the difference with the control group was no longer significant (p=0.55).
Discussion
Participants included in the trial were, as expected, persons severely dependent on street heroin, who could not find a solution to their addiction with the existing treatments. Participants in the experimental group decreased significantly their street heroin use. However, in our follow-up study, street heroin use increased significantly in the experimental group 3 months after the end of the diacetylmorphine treatment. In the foreign studies, diacetylmorphine treatment showed greater efficacy compared to methadone treatment for this target group and the improvement was sustained after the trial even when the treatment was stopped, but not when the end of treatment was forced against the will of the patient. Nevertheless, our research showed the feasibility of a diacetylmorphine treatment in Liège and its acceptance by the actors involved in the trial.
Conclusion
Diacetylmorphine treatment is feasible in Belgium. In foreign studies, it showed more efficacy than methadone treatment and benefits gained with this approach were maintained during years. But these benefits disappear when the end of treatment is forced, against the will of the patient.
