Abstract :
[fr] Cette communication entend envisager le vocabulaire artistique tel qu’il s’élabore dans un contexte d’utilisation précis, celui du récit de fête. En marge des écrits théoriques et des principaux réseaux de diffusion d’une lexicographie artistique, le livre de fête se présente en effet comme un précieux laboratoire pour étudier la constitution, l’usage et la circulation d’un vocabulaire artistique dans l’Europe du XVIIe siècle. Destiné à conserver la mémoire de l’événement éphémère, le récit de fête donne aux mots le pouvoir de reproduire l’image de l’objet artistique et de renouveler l’expérience du merveilleux que le lecteur ne peut pas ou plus éprouver. Mis au service de l’ekphrasis, les mots et les procédés rhétoriques y sont chargés de rendre compte des différentes composantes de l’appareil festif (tableau, quadro, pictura, scultura, ornement, etc.), de décrire leurs caractéristiques (forme, couleur, gestuelle, etc.), la manière dont ils sont réalisés (matière, ordonnancement, inventio, technique, etc.) ou la valeur qui y est associée (beauté, nouveauté, prix, ingenium, etc.), mais ont aussi pour tâche de transmettre l’effet produitet recherché sur le public (émerveillement, illusion, plaisir, saisissement,etc.).
En envisageant le livre de fête comme un laboratoire lexical à part entière, recouvrant des enjeux qui lui sont propres, il s’agira d’explorer un corpus de textes relatant les festivités jésuites organisées à l’occasion de la canonisation d’Ignace de Loyola et de François Xavier en 1622, lesquelles ont donné lieu à des célébrations dans toute la chrétienté. L’étude synchronique axée sur des comparaisons entre les récits italiens, latins et français permettra de cerner les phénomènes artistiques à travers les mots, de suivre dans le cadre géographique européen les variations expressives des termes et des notions artistiques dans les différentes langues. Un échantillon de mots et de notions inhérents aux champs lexicaux de la description des apparatiet de la perception de l’objet artistique sera confronté aux définitions des dictionnaires, aux traductions et à la littérature artistique contemporains. Une attention particulière sera consacrée aux synthèses théoriques sur le spectaclequi en codifient le langage, comme celles réalisées par Claude-François Ménestrier (1631-1705).