Abstract :
[fr] En 1930, Liège et Anvers accueillent chacune une vaste exposition célébrant le centenaire de l’indépendance de la Belgique. À Liège, probablement sous l’impulsion de Victor Bourgeois, un concours d’habitations ouvrières est organisé sur les hauteurs de la ville, dans le quartier du Tribouillet. L’événement est un moment fort de l’histoire de l’architecture à Liège, ville industrielle belge de seconde importance.
Si l’essentiel du site, urbanisé selon le modèle de la cité-jardin, est occupé par des petites habitations unifamiliales sans innovations particulières, un secteur est réservé aux maisons dites « minimum ». Il y a, dans le chef des organisateurs, une volonté manifeste de s’inscrire dans la continuité des réflexions du CIAM 2 de Francfort et de faire écho aux « Journées de l’habitation minimum » présentées à Bruxelles en 1930. Des personnalités reconnues pour leur expertise en matière de logement public comme Victor Bourgeois, Louis Herman de Koninck, Fernand Bodson ou encore Joseph Moutschen sont invitées à présenter leurs conceptions du logement « moderne ».
Notre contribution se propose, d’abord, de situer ces interventions dans la généalogie de la production de ces architectes en soulignant leurs particularités spatiales, constructives et esthétiques. Il s’agit également de montrer comment ces « phénomènes » ont influé sur la pratique locale, en particulier sur les jeunes architectes fascinés par les modèles internationaux, et comment ils furent reçus tant dans la maîtrise d’ouvrage privée que publique. Notre intervention montrera également en quoi l’expérience de 1930 fut un moment charnière dans les politiques locales de logement public. Car si l’historiographie reconnaît la portée du concours du Tribouillet, en tant que phénomène de spectacularisation locale et nationale des concepts du Mouvement moderne, elle oublie que l’événement marqua provisoirement la fin du recours au modèle de la cité-jardin à Liège. Écrasées par des charges de plus en plus lourdes, les sociétés de logement réinvestissent les centres urbains abandonnant le modèle de la petite maison unifamiliale au profit de l’immeuble à appartements.
Une attention particulière sera également apportée au contexte culturel et au vif débat que connaît l’architecture à Liège dans l’entre-deux-guerres à travers l’analyse des revues locales et des expositions qu’elles organisèrent pour diffuser leurs modèles.