Mîmâmsâ; Bouddhisme; Véda éternel; apaurusheya; transmission orale du Véda; Dharmakîrti; connexion mot-sens-objet; convention; sa
Abstract :
[fr] L’une des polémiques les plus ardentes entre la Mīmāṃsā et le Bouddhisme porte sur l’éternité du Véda.
Pour la première, le Véda existe de toute éternité et il n’a pas d’auteur ni humain ni divin ; il est –nous dit le mīmāṃsaka Śalikanātha - apauruṣeya, «(d’origine) non personnelle ». Pour le second, un tel dogme est inadmissible et un de ses plus éminents penseurs, Dharmakīrti, s’attache à le réfuter.
Pour la Mīmāṃsā, la transmission orale du Véda de maître à élève n’est pas seulement vue de manière empirique ou imagée, comme remontant à un temps immémorial ; elle n’a tout simplement pas de début. Les mots du Véda se sont agencés d’eux-mêmes et les noms d’êtres humains qu’on y trouve ne sont pas ceux des auteurs de l’œuvre, mais ceux des responsables de sa proclamattion (pravacana).
Le ou les créateurs d’une œuvre fameuse sont inoubliables. Si on ne les connaît pas pour le Véda, c’est qu’ils n’existent pas. Si le Véda avait été composé par des fous (unmatta), il serait incompréhensible.
Quant à son message : « le sacrifice mène l’homme au ciel», il n’est pas pensable qu’il découle d’une source purement humaine, à l’inverse du message du Buddha qui, en revanche, s’inscrit aisément dans le schéma humain moyen-fin.
Face à cette approche, le bouddhiste Dharmakīrti remarque d’abord que la chaîne de transmission du Véda est humaine et donc imparfaite et exposée à l’erreur. Le fait pour le Véda d’être sans commencement ne signifie pas qu’il est sans fondement humain. D’ailleurs s’il a une «(origine) non- personnelle, il devient incompréhensible pour les êtres humains, car des mots incréés par l’homme ne transmettent les intentions de personne et des significations pour personne.
Après avoir rejeté le point de vue des mīmāṃsaka’s, Dharmakīrti conclut en répétant que la connexion mot-sens/objet n’est pas sans commencement mais surgit d’une convention (samaya) entre les locuteurs humains et que c’est grâce à eux qu’elle se poursuit à travers le temps.