Abstract :
[fr] La pauvreté est au cœur des enjeux actuels de société. Elle est très souvent associée aux grandes villes. Toutefois, bien que moins visible et moins médiatisée, la pauvreté est bel et bien présente dans nos campagnes. Les récentes métamorphoses du milieu rural, telles que l’urbanisation de nombreux communes et l’évolution du monde agricole, ne sont pas sans conséquences pour ses habitants. Or, certains groupes sont plus exposés aux répercussions négatives de celles-ci. Par définition, la pauvreté s’entend comme un réseau d’exclusions sociales qui s’étend sur plusieurs domaines de l’existence individuelle et collective. Les caractéristiques du milieu rural ont des conséquences directes sur les réseaux d’exclusions des personnes en situation de pauvreté. Ces exclusions s’expriment en termes d’accessibilité : accessibilité à un emploi, à un logement, à la santé, à la consommation, aux loisirs, etc. Globalement, l’obstacle fondamental à l’accessibilité réside dans l’absence de ressources financières. En milieu rural, cette problématique d’accessibilité est renforcée par l’aspect géographique qui fait l’apanage du milieu rural, à savoir l’étendue des distances à parcourir pour atteindre un centre d’intérêt.
Dans son étude, le Panel Démographie Familiale a retenu sept constats. Pour commencer, le milieu rural est fortement marqué par un vieillissement de sa population. Or, les seniors constituent un groupe fragile important, exposés au risque de pauvreté. En effet, le coût financier d’un maintien à domicile peut s’avérer considérable pour des personnes au fur et à mesure dépendantes et dont les revenus sont parfois très faibles. A cela s’ajoute le sentiment d’isolement, lié à la diminution du réseau social après le passage à la retraite, au départ des enfants, et à l’espace géographique dispersé.
Une seconde réalité est la problématique de l’accessibilité en termes de mobilité. En effet, s’approvisionner, effectuer des démarches administratives, se soigner, ou encore se cultiver peut prendre une journée entière pour des personnes démunies d’un véhicule personnel et donc tributaires des transports en commun. Le manque d’autonomie liée à la difficulté de se déplacer est un frein à la participation à la vie en société.
Or, les transports en commun font partie des services les plus touchés par notre troisième problématique, à savoir le recul et la rareté des équipements et des services. En prise avec la faible densité de population et la dispersion de celle-ci, et pour des raisons de rationalisation et d’économies d’échelle, les infrastructures, tant publiques que privées, tant dans le secteur marchand que non marchand, se sont raréfiées ou détériorées. En ce qui concerne le secteur de l’aide, à cela s’ajoute la question d’atteindre réellement les personnes en difficulté, sachant que certaines personnes parmi les plus précarisées peuvent être exclues de l’aide sociale, soit par méconnaissance des services, soit parce que ceux-ci, bien que sociaux, constituent un coût encore trop élevé.
Nous avons évoqué la problématique de l’accessibilité. Celle-ci affecte de manière évidente un quatrième élément, l’accès à l’emploi, et ce, dans tous ses aspects : offres d’emploi, maisons de l’emploi, entretiens d’embauche, lieux de travail ou de formations. En outre, le milieu rural n’est pas générateur d’emploi. Il est marqué par une réduction de l’emploi dans le secteur primaire, une instabilité issue du secteur de l’Horeca.
A cela s’ajoute la problématique du logement. Certaines communes rurales, situées en zones périurbaines proches de pôles urbains offrant de l’emploi, sont soumises à une augmentation plus rapide des valeurs foncières et immobilières. De plus, l’offre générale de logements est insatisfaisante, en termes de qualité (logements inadéquats), taille (manque de logements individuels), prix (manque de logements sociaux) et localisation (logements très isolés). Reste encore la problématique de l’habitat permanant qui concerne entre 10.000 et 15.000 résidents.
Le sixième constat trait à une forte stigmatisation et pression sociale liée à la relative proximité des résidents ruraux et à la méconnaissance du phénomène de pauvreté.
Enfin, le secteur agricole quant à lui a été marqué à la fois par une transition vers une agriculture de type plus industriel et par un profond déclin. Directement lié aux revenus irréguliers et réduits, aux investissements importants et aux risques financiers nécessaires engendrant des situations d’endettement, le taux de pauvreté des agriculteurs est supérieur à celui de la moyenne de la population. De par leur statut, les agriculteurs n’ont doit à aucune aide sociale.