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Abstract :
[fr] Si les anciens Grecs ont donné en partage leurs paysages aquatiques – sources, fleuves et rivières, mers et océans – à un grand nombre de divinités différentes, il semble bien qu'ils faisaient de Zeus le seul dieu compétent en ce qui concerne la pluie. Depuis le « Zeus pleut » homérique, la littérature grecque abonde en effet de témoignages suggérant ce rapport d'exclusivité. Sans prétendre changer fondamentalement la donne, une analyse des données cultuelles – à partir des sources épigraphiques notamment – permettra sans doute de préciser, d'ajuster cet état de fait qui semble de fait souffrir de bien peu d'exceptions. Un examen systématique des nombreuses épiclèses « pluvieuses » du polythéisme hellénique tend en effet à confirmer le caractère spécifiquement jovien de ce domaine de compétence – les autres divinités ne semblant y intervenir qu'à ses marges (Apollon et la grêle par exemple).
Mais le constat de la richesse et de la diversité de ces épithètes cultuelles constitue surtout le marchepied nécessaire à une réflexion sur les fondements et les modalités des adresses des Grecs à leurs dieux – leur Zeus en l'occurrence – pour tenter de gérer au mieux l'eau du ciel. Une étude exhaustive de ces épiclèses et des données cultuelles qui leur sont associées permet en effet de souligner en outre les spécificités de ce champ de compétence divin, dans le temps – à la fois sur le plan du temps rituel, mais aussi des évolutions depuis l'époque archaïque jusqu'à la période impériale – comme dans l'espace. Sur ce dernier point en effet, force est de constater que les épiclèses pluvieuses de Zeus ont partie liée à l'emprise spatiale du dieu, sommitale en l'occurrence. Plus globalement, elles ne se limitent pas à ce strict domaine d'intervention ; inversement, d'autres épithètes non explicitement pluvieuses peuvent aussi désigner le Zeus faiseur de pluie. Ainsi, ces épiclèses se trouvent au sein d'un réseau de champs de compétences joviens qui ne sont pas isolés, mais bien articulés les uns aux autres. Et c'est dans ce réseau qu'il est possible de déceler, in fine, la cohérence de cette construction culturelle qu'est Zeus.
Sans pouvoir prétendre aborder l'ensemble des conceptions grecques en matière de pluie, ce parcours à travers les épiclèses pluvieuses de Zeus permettra néanmoins d'évoquer quelques dossiers relevant tant du rite (cas de la danse de la pluie, cadres rituels, calendaires par exemple), que de la pluviométrie (précipitations et sécheresse) ou encore de l'agriculture, le tout s'inscrivant dans les récents débats conceptuels relatifs à la cohérence du polythéisme. Compte tenu de sa richesse, la documentation attique sera privilégiée, sans toutefois négliger les parallèles extra-athéniens, depuis l'époque archaïque jusqu'au Haut-Empire.