Grétry mémorialiste ou l'ethos du compromis

On aborde ici les rapports existants entre figurations auctoriales et monde du spectacle, à partir d’une source relevant d’un genre littéraire plus traditionnellement lié à l’autoreprésentation des auteurs – celui des mémoires. L’ethos mis en place par le musicien André Modeste Grétry dans ses Mémoires, ou essais sur la musique est envisagé selon un angle rhétorique,. Grétry composait pour l’Opéra comique, genre léger qui coexistait avec la tragédie et le drame sur la scène théâtrale française des Lumières. Grétry, pressentant les risques inhérents à la prise de parole littéraire par un amateur, construit son ethos discursif en vue de maximiser l’acceptabilité de son discours par la classe lettrée. En résulte une certaine ambivalence dans sa présentation de lui-même : alors qu’il légitime explicitement sa prise de parole par la construction d’un ethos conforme de musicien humble, compétent techniquement et sans prétentions littéraires, il parsème son ouvrage de signaux implicites (choix génériques, vocabulaire, références culturelles, imaginaire de l’écriture) qui tendent à le réinscrire au sein de l’élite littéraire à laquelle il affirme ne vouloir prétendre appartenir.