Abstract :
[fr] Originaire d’Asie Mineure, Irénée est un témoin de la situation de plurilinguisme dans l’Imperium Romanum du IIe s. apr. J.-C. Comme beaucoup de ses contemporains, il est venu à Rome, ville cosmopolite au centre de l’Empire. Plutôt que de retourner dans sa patrie natale, il a poursuivi sa route vers l’Occident pour se fixer en Gaule, à Lyon, dont il deviendra évêque. Irénée a donc connu plusieurs situations linguistiques. Il se meut d’abord au sein de l’Empire romain, où deux langues coexistent, le latin et le grec, qui atteignent, durant le IIe s., un point d’équilibre, dont témoignent certaines œuvres, comme les Nuits Attiques d’Aulu-Gelle. Ensuite, l’Asie Mineure, d’où est parti Irénée, se caractérise par une grande diversité linguistique et par une survivance des parlers locaux. Le christianisme s’est appuyé sur ces langues locales, persistantes dans les campagnes, tandis que les villes, hellénisées, restaient des foyers du paganisme. Enfin, en Gaule, la question est de savoir dans quelle mesure la langue des Gaulois a persisté et a pu être connue d’Irénée. A ce sujet, un passage de la préface de l’Adversus haereses (Οὐκ ἐπιτητήεις δὲ παρ᾿ἡμῶν, τῶν ἐν Κελτοῖς διατριβόντων καὶ περὶ βάρβαρον διάλεκτον τὸ πλεῖστον ἀσχολουμένων… « Tu n’exigeras de nous, qui vivons chez les Celtes et qui, la plupart du temps, traitons nos affaires en dialecte barbare… ») mérite d’être analysé. C’est probablement le latin qu’il faut voir dernière l’expression « dialecte barbare ».