Abstract :
[fr] Au vu de sa taille et de sa position géographique, la Belgique, entourée de puissances
dites moyennes, est « devenue un État pour qui la sécurité et la défense se déclinent
dans le champ multinational » 1, renonçant à disposer de capacités élargies et d’une
politique de défense indépendante et autonome. Parmi les organisations
internationales dont la Belgique est membre, l’Union européenne et l’OTAN
constituent des cadres de coopération prioritaires en vue de garantir et d’améliorer sa
politique de sécurité et de défense 2. Parallèlement, les opérations extérieures sont
devenues, dans l’environnement post-guerre froide, le core-business des forces
armées 3. Ainsi, la Belgique fait des opérations extérieures la tâche prioritaire de son
appareil militaire.
Dans ce cadre, il s’agira d’examiner le processus national de décision relatif à la
participation à des opérations de gestion de crise dans le cadre de l’UE et de l’OTAN ;
élaboration dont une partie seulement est visible et publique. Ce thème, peu exploré
dans la littérature belge par rapport aux publications sur le même sujet à l’étranger et
dans les pays anglo-saxons, recouvre à la fois l’examen des procédures, les acteurs et
leurs interactions politiques et militaires 4.
L’examen est périlleux dans la mesure où il se fonde aussi sur les témoignages
d’acteurs et sur leurs perceptions subjectives du processus avec, comme le souligne
Vincent Legrand, « tous les biais que cela comporte en termes de reconstruction, de
rationalisation a posteriori de l’événement relaté, tant en termes cognitifs (réduction
de la complexité) que normatifs (légitimation de la décision) 5 ».
Ce Courrier hebdomadaire abordera rapidement les notions théoriques autour du
processus de décision avant d’examiner plus en détail le noyau principal du processus
décisionnel en Belgique autour du thème qu’est la gestion des crises dans le champ
politico-militaire. Il s’agira aussi d’analyser les acteurs dits « périphériques » au champ
d’étude (Palais, Parlement, groupes de pression, opinions publiques). Enfin, nous examinerons les interactions et interrelations des acteurs dans la gestion des crises lors
de missions UE et lors de missions OTAN, lorsque la Belgique est engagée.
Pour des raisons propres à l’accès aux sources mais aussi aux questions relatives aux
entrevues, la période d’étude et les données récoltées correspondent pour l’essentiel
aux gouvernements fédéraux qui se sont succédé entre juillet 1999 et mars 2008.
Cependant, la plupart des informations récoltées et l’analyse qui en est faite restent
pertinentes en 2011.
1 A. DUMOULIN, P. MANIGART, W. STRUYS, La Belgique et la Politique européenne de sécurité et de défense,
Bruylant, Bruxelles, 2003, p. 155.
2 S. BISCOP, J. COELMONT, R. COOLSAET, M. LIÉGEOIS, J. ROSIERS, D. WOUTERS, « La contribution
militaire belge à la Politique Européenne de Sécurité et de Défense », Egmont PAPER, n° 14, juin
2007, p. 8.
3 A. DUMOULIN, P. MANIGART et W. STRUYS, La Belgique et la Politique européenne de sécurité et de
défense, op. cit., p. 348.
4 Les acteurs et les processus de décision constituent des facteurs parmi d’autres qui déterminent la
politique de sécurité et de défense d’un pays. Cf. la grille d’analyse des politiques nationales de
défense dans D. J. MURRAY, P. R. VIOTTI, The Defense policies of nations. A comparative study, 3e éd.,
John Hopkins, 1994.
5 V. LEGRAND, « La prise de décision en politique étrangère », in C. ROOSENS, V. ROSOUX,
T. DE WILDE D’ESTMAEL, La politique étrangère. Le modèle classique à l’épreuve, Peter Lang, Bruxelles,
2004, p. 98.
6 LE PROCESSUS DÉCISIONNEL BELGE EN MATIÈRE D’OPÉRATIONS CIVILO-MILITAIRES
CH 2086-2087