Abstract :
[fr] Il s’agit ici de montrer que le concept de médiation a une portée critique, qu’il s’agit d’un concept propre à séparer, à distinguer, à révéler des enjeux politiques, qu’il n’est pas seulement propre à décrire des pratiques, mais également à les interroger. Le concept de médiation a une portée critique dès lors qu’il questionne le rapport entre communication et politique, notamment à travers la question des normes communes, du “sens commun”, de la transmission, du rôle du conflit, etc.
En partant de l’approche de Lamizet, qui conçoit la médiation comme ce qui prend en charge et opère une relation singulier/collectif, je propose d’envisager non pas ce qui s’interpose (dispositifs, médiateurs) entre l’oeuvre et le public, mais bien la relation que le public établit avec l’oeuvre et les dispositifs, en considérant que ceux-ci font médiation, c’est-à-dire inscrivent l’individu dans une forme de communauté. A travers cette conception d’une “médiation esthétique”, on peut réintroduire la notion de médiation culturelle telle qu’elle est comprise par la plupart des auteurs (comme “transformation”, Davallon, 2003, comme “recherche infinie de significations”, Darras, 2003) dans sa dimension non seulement critique mais également politique. Cette approche de la médiation suppose qu’on la décrive en des termes qui permettent de la mettre en relation tant avec l’émancipation (Rancière, 2000, 2008) qu’avec l’aliénation ou la contrainte. Nous verrons alors qu’il faut la décrire comme mésentente (Rancière, 1995), malentendu (Derrida 1990) ou désynchronisation (Stiegler, 2003), c’est-à-dire : “incalculable” (Derrida), asymétrique, et fondée sur la possibilité de l’échec, ce que Rancière appelle l’ “efficacité paradoxale” des oeuvres.