[fr] Dans son film de 2010, Abdellatif Kechiche rapporte l’histoire authentique de Sarah Bartman, la Sud-africaine callipyge, amenée en Europe au début du 19e siècle par son maître rencontré au mal nommé Cap de Bonne Espérance, pour être exhibée dans les foires1. Plusieurs fois récompensé aux César pour ses films précédents, le réalisateur tunisien était attendu au tournant par les critiques sur ce sujet extrêmement difficile, constituant l’une des pages honteuses de l’histoire des rapports entre Europe et Afrique du Sud. L’art de Kechiche n’est pas simplement celui d’éviter les clichés : au contraire, il montre leur ténacité, exhibe les pièges dans lesquels le spectateur est susceptible de tomber, puis fait voir les écarts qui séparent les clichés de la réalité. Par ce jeu sur les idées toutes faites qui ont la vie longue, Kechiche nous épargne les affects tristes de la mauvaise conscience, de la compassion et de la pitié. Tout en racontant l’histoire d’une femme torturée en train de s’écrouler, le réalisateur dresse dans La Vénus noire le portrait d’un personnage qui résiste de toutes ses forces à la condition de sauvage qu’on lui impose. Et qui n’est jamais totalement là où on l’attend.
Disciplines :
Philosophy & ethics Performing arts
Author, co-author :
Hagelstein, Maud ; Université de Liège - ULiège > Département de philosophie > Département de philosophie