Abstract :
[fr] La création architecturale est une activité de conception complexe qui travaille à la fois son oeuvre et son processus d’une façon dynamique. L’évolution des technologies, l’élargissement des contraintes normatives, la variété des objectifs et l’accélération des transferts d’informations génèrent un courant de fragmentation de la maîtrise des connaissances. Cette dispersion des compétences tend à affaiblir la puissance de l’activité créatrice.
En réponse, l’intégration de la conception cherche à élargir l’intervention des acteurs en rassemblant leurs compétences au début du processus de design et en augmentant la portée de ce dernier. L’intégration des domaines, que nous préférons actuellement à celle des acteurs, doit être réalisée sur de nouvelles bases: la conception coordonnée nécessite une nouvelle description de ses composants mixés.
Notre réflexion s’attache à étendre la définition des concepts architecturaux sur la voie d’une assistance à la conception préparant l’intégration des domaines.
Notre suggestion concerne l’extériorisation de la pensée créatrice d’espaces - dans la mesure où elle peut l’être - et son exploitation à travers une représentation sémantique.
Avec l’ambition d’appuyer la composition architecturale, notre modèle est construit sur trois rangs de compatibilité: le processus, le contenu et le support.
1. Notre modèle propose une structuration du processus de conception qui couvre les plages caractéristiques des modèles opératoires. Il permet de suivre, sur les différents niveaux de conceptualisation, les stratégies composant la réflexion.
Par son ouverture aux divers modes de design, il peut accueillir un large champ méthodologique, permettant toute forme d’expression de la créativité.
2. Détachée de sa représentation graphique et géométrique, nous dotons l’architecture d’une expression symbolique qui permet de la travailler
à degré d’abstraction en meilleure correspondance avec celui d’une réflexion en phase de conception.
Notre modèle est bâti sur les relations des éléments signifiants qui composent l’architecture.
Ainsi formulée, elle se prête à l’évaluation sémantique, proche du jugement, et nourrit le travail de la composition. La “conscience” cédée à l’objet travaillé développe notre modèle en un système réactif.
3. En adoptant les principes des techniques informatiques, le modèle se place dans l’évolution des supports de la connaissance. Dans l’attente de technologies à la fois hautement interactives et disposant des principes d’évolution du modèle supporté, notre approche fondamentale ne peut qu’observer les tendances et s’appuyer sur les instruments et postulats partiels des domaines concernés par l’intelligence artificielle.
La composition d’architecture s’appuie sur une large culture implicite. Afin de maintenir un transfert d’informations équivalentes entre le concepteur et son modèle, nous installons notre représentation sémantique dans un environnement de connaissances architecturales et opérationnelles.
En adoptant l’approche analogique, fréquemment utilisée en conception, c propose une assistance basée sur l’heuristique, capable d’introduire un mode de pensée nouveau dans l’esprit créateur.
Il peut ensuite suivre l’évolution des concepts utilisés par l’architecte et conserver un répondant pertinent, grâce au caractère ouvert que nous lui avons donné.
Cette faculté d’adaptation doit cependant établir un mode d’échange non contraignant avec le concepteur. Notre proposition d’exploiter l’esquisse, support de raisonnement traditionnel, est validée comme moyen d’expression de l’intention architecturale.
Résolument orientée vers l’acquisition d’une expression déliée, l’interface-esquisse accueille traces graphiques, hi-graphes et relations explicites nourrissant le modèle sémantique jusqu’au product model.
Par sa composition, notre plate-forme répond aussi à deux questions:
1. elle suggère une réponse positive à l’applicabilité des principes de décomposition d’Alexander, mais en maintenant toute sa signification à chaque sous-représentation de l’analyse et du projet;
2. proposée comme modèle pivot, elle dépasse l’intégration des données pour s’établir comme représentation générique, apte à réinterpréter les motivations connexes dans le cadre d’actions concertées.
Bien que le texte de notre proposition soit rédigé à l’indicatif présent, le mode conditionnel lui conviendrait mieux. En effet, notre réflexion se base sur l’expérience acquise par le développement de prototypes partiels, répartis sur l’ensemble du domaine de la pré-conception. Toutefois, nous ne pouvons prétendre que l’ensemble de ce domaine soit totalement couvert, même si notre travail a contribué à en explorer les limites.
De plus, notre intervention s’arrête avant la phase de spécifications du modèle complet.
Notre réflexion ne s’applique pas encore aux exigences du monde professionnel, même si elle apporte un certain nombre de réponses dans la phase d’esquisse, ainsi qu’à certaines étapes spécifiques, comme l’acquisition de données en site existant. Elle pourrait, par exemple, servir de support à une description spatiale à laquelle il est possible d’attacher les paramètres descriptifs des composants physiques1.
Par ailleurs, nous avons tenté de lancer des pistes vers la production, en particulier via l’intégration du product model.
Par contre, dans le cadre de l’enseignement, les modèles conceptuels développés dans ce travail peuvent être appliqués directement dans le cours de méthodologie du projet.
De même, les recherches réalisées pour l'élaboration de bases de cas sont directement utiles aux étudiants dans la structuration de leurs références architecturales.
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Lebahar a très bien défini le rôle de l’esquisse architecturale. Nous pensons avoir complété cette approche en y apportant un formalisme concret, ouvrant un champ d’exploitation nouveau.
Déplacée du papier vers un support virtuel, l’esquisse peut conserver pluslongtempsl’expressionsémantiquedeson abstractionsymbolique et relationnelle et porter la réflexion à mieux construire et gérer ses connaissances.
Ainsi assistée dans la gestion de cohérence, dans l’administration des références, dans le suivi des processus et la négociation des conflits, la pratique de la conception peut envisager d’accueillir l’intégration féconde d’une équipe multidisciplinaire de concepteurs et d’élargir son emprise au cycle de vie de l’oeuvre architecturale.