No document available.
Abstract :
[fr] Des États généraux qui se tiennent à Blois, on ne retient généralement que l’assassinat des Guises commandité par Henri III (23 et 24 décembre 1588), qui précipite la révolte de la Ligue catholique contre le roi. Or cette assemblée s’est réunie durant près de trois mois et a été le théâtre de nombreux événements. Ces derniers, éclipsés par le célèbre événement sanglant, n’en sont pas moins capitaux pour contribuer au renouvellement actuel de l’histoire des guerres de Religion. Aussi décentrer le regard permet-il de rompre avec une lecture téléologique des États de Blois mais aussi d’en explorer toute la fécondité.
L’un des éléments ainsi mis au jour est la double prise de parole de Renaud de Beaune, archevêque de Bourges. Au nom du clergé, le prélat prononce, le 16 octobre, un Remerciement fait au roy au nom des Estats de ce royaume, sur la proposition faicte par Sa Majesté à l’ouverture de ses Estats et, le 18 octobre, une Briefve exhortation faicte aux Estats de ce royaume, par commandement du roy, sur le serment solemnel presté par Sa Majesté. Ces deux textes se présentant comme la retranscription fidèle des propos prononcés à Blois par Renaud de Beaune, ils résultent d’une double mise en scène de la parole que j’entends analyser dans trois directions.
Premièrement, comment ces prises de parole ont-elles été organisées dans le contexte dense de l’assemblée ? Quelles négociations ont été conduites pour désigner Renaud de Beaune porte-parole du clergé ? Quels sont les effets visibles de ce processus dans ses interventions ? Quels sont les rapports de sa parole avec celles qui la précèdent ?
Deuxièmement, comment cette parole est-elle mise en scène par l’imprimé ? Quelle est la nature exacte du rôle joué les imprimeurs du roi Jamet Mettayer et Federic Morel, qui diffusent sous format de libelle les deux interventions ? Quelles stratégies éditoriales sont décelables dans la retranscription, par l’imprimé, de propos oraux ? Quels sont les rapports de force politiques à l’œuvre dans la structuration écrite de cette double intervention ?
Troisièmement, comment l’ethos de prélat se combine-t-il avec cette double mise en scène ? Peut-on déceler des spécificités dans les interventions de Renaud de Beaune, par comparaison avec les autres prises de parole des 16 et 18 octobre ? Quels étaient les enjeux particuliers de diffusion, par les imprimeurs royaux, de la parole d’un archevêque dans un contexte de troubles civils et religieux ?