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Abstract :
[fr] Selon la coutume de Liège, telle qu’elle nous a été notamment rapportée par les écrits de l’échevin liégeois Pierre de Méan (1572-1638), toute femme passait, en se mariant, sous la puissance ou « mainplévie » de son nouvel époux. Ce dernier était fait maître des biens du ménage, en ce compris donc les biens apportés à l’union par sa femme, dont il pouvait user, jouir, voire disposer à sa guise sans avoir besoin pour cela du consentement de celle-ci. Le principe, l’étendue et les exceptions apportées par la coutume elle-même à ce régime matrimonial coutumier défavorable aux femmes ont déjà été analysés à plusieurs reprises par les historiens du droit, qu’il s’agisse de Raikem et al. (1870, 1873, 1884), Bomerson (1930) ou, plus récemment, Lagasse (2017). Dans la présente contribution, nous souhaitons mettre en exergue plusieurs documents tirés de nos recherches au dépôt des Archives de l’État à Liège qui indiquent que cette règle coutumière, d’application si simple en apparence, pouvait être source de frictions dans la pratique juridique quotidienne des conjoints liégeois et de leurs familles. La découverte de ces sources, bien qu’enthousiasmante, est toutefois également frustrante, puisque celles-ci laissent à la fois entrevoir, toucher du doigt la richesse du sujet, tout en faisant ressentir les limites posées entre autres par l’état actuel des fonds d’archives judiciaires de la principauté de Liège. En ce sens, nous argumenterons en particulier que continuer à faire l’inventaire des fonds de l’Officialité et des Échevins de Liège (dans la mesure où l’état des documents le permet) devrait favoriser la trouvaille de nouvelles sources susceptibles de mettre à jour les points de tension, ainsi que le positionnement et l’attitude des acteurs du monde juridique (notaires, commentateurs de la coutume) et judiciaire (avant tout, les juges) à l’égard de la protection des intérêts patrimoniaux de l’épouse tout au long de l’union conjugale. De manière générale, en se focalisant sur une question juridique précise, notre contribution espère parvenir à montrer la variété des sources disponibles aptes à contribuer à l’écriture d’une histoire du droit des femmes et du genre dans la principauté de Liège.