L'élevage intensif des poissons dans les eaux chaudes industrielles. Perspectives et contraintes en Belgique

Dans le contexte du Dossier Bio-technologie de la revue, cet article décrit les principaux volets du projet de R-D entrepris en 1977 par l'Université de Liège à l'initiative de la société INTERCOM, en vue de valoriser par l'élevage des poissons les importants rejets d'eau de la Meuse réchauffée par passage dans les systèmes de refroidissement de la centrale électronucléaire de Tihange. La technologie développée se fonde sur le fait que pour les poissons qui sont des animaux à sang froid, la possibilité de disposer d'eau plus chaude qu'en situation naturelle, permet d'améliorer les performances de croissance et de reproduction et d'envisager l'élevage dans nos régions d'espèces de poissons tropicales à grandes performances. Dans le projet développé à Tihange, l'innovation majeure a consisté à centrer les recherches sur la mise au point des différentes phases de l'élevage d'un poissons tropical, le tilapia du Nil, exigeant des températures supérieures à 15°C et idéalement comprises entre 22 et 30°C. Grâce à la recherche en station d'essais, ont pu être optimisés les principaux paramètres de production des poissons : reproduction contrôlée, production massive d'alevins, croissance rapide, bonne efficacité d'utilisation des aliments composés, forte densité de population dans les bassins et essais d'élevage en circuit semi-fermé. Par rapport à l'état d'avancement des recherches en 1981, l'article évoque les problèmes majeurs rencontrés effectivement ou potentiellement, particulièrement: i) les contraintes liées au site (volume d'eau disponible et régime des températures), ii) les contraintes écologiques et sanitaires liées à la pisciculture dans l'eau de la Meuse, iii) les contraintes culturelles associées à la mise sur le marché d'un produit, le poisson tilapia, tout-à-fait nouveau et au fait que l'élevage est étroitement lié à l'énergie nucléaire et iv) les contraintes de nature économique (investissements dans des infrastructures lourdes), administrative (faible intérêt pour des techniques non traditionnelles) et politique (risques de dispersion des moyens). Pour tester la faisabilité technique et la rentabilité économique d'un développement du projet, une installation pilote pour produire 10 tonnes de tilapias est en préparation et une ferme piscicole importante est projetée à court terme.