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Abstract :
[fr] Cette communication propose de saisir le pair accompagnement comme « carrière » pour les personnes en situation de handicap physique en Afrique du Sud. Ce faisant, j’appréhende le point de vue de pairs accompagnants qui vivent au sein d’un ancien township coloured du Cap, Mitchell’s Plain. Mitchell’s Plain abrite le centre de rééducation le plus spécialisé du pays, construit en 2006 à partir d’un programme de reconstruction des zones défavorisées, mais appartient également aux Cape Flats, zone connue pour sa relative pauvreté et son insécurité. Les matériaux présentés (entretiens individuels, focus groups et observations directes) ont été collectés durant 18 mois de terrain auprès de plusieurs organisations pour ou par des personnes en situation de handicap physique, entre 2014 et 2017. Les analyses dérivent quant à elles de ma thèse en anthropologie, thèse soutenue en décembre 2018.
Après une courte introduction aux politiques sociales du handicap en Afrique du Sud, la présentation s’arrêtera sur la formation et les compétences requises pour être considérés comme pair accompagnant. Les différentes formations présentées produisent toutes un discours sur l’expertise et la légitimité du travail réalisé par le pair. Je propose alors un parallèle entre cette figure et celle des brokers, une figure d’intermédiaire bien connue en Afrique et étudiée dans la littérature sur le développement (Bierschenk et al. 2002 ; Swidler et Watkins 2009). Ces deux figures permettent en effet de revendiquer une identité « éduquée » et l’appartenance à une « élite aspirante ». Nous verrons toutefois comment ces deux qualités se voient régulièrement remises en question par les professionnels de la santé ou d’autres personnes en situation de handicap.
Une troisième partie interroge les aspirations auxquelles répond la pratique de pair accompagnement. Dans une économie où le taux d’emploi est seulement de 59%, les personnes en situation de handicap peinent souvent à trouver du travail. Ce faisant, le pair accompagnement représente une opportunité. Vocation religieuse, développement de soi et devoir civique s’associent alors à une recherche de revenus dans les discours des pairs. Ces discours révèlent aussi la « carrière espérée » du pair accompagnant dans Mitchell’s Plain, carrière cependant très rarement accessible, ce qui pousse de nombreux pairs à abandonner la pratique.